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Bollywood en chansons : 1985-1989

Publié jeudi 23 novembre 2017
Dernière modification lundi 11 septembre 2017
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Par Mel

Dossier Bollywood en chansons
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Ram Teri Ganga Maili

Année : 1985
Réalisation : Raj Kapoor
Avec : Mandakini, Rajiv Kapoor, Kulbhushan Kharbanda et Saeed Jaffrey
Box Office : n°1, All Time Blockbuster

Le film : Le dernier film de Raj Kapoor, Ram Teri Ganga Maili (« Seigneur (Ram), ton Gange est souillé ») écrit et réalisé trois avant sa mort, reprend une nouvelle fois les thèmes qu’il a développé tout au long de sa carrière. Il raconte l’histoire de Naren (Rajiv Kapoor), le fils d’un industriel véreux (Kulbhushan Kharbanda) de Calcutta, qui tombe amoureux d’une villageoise (Mandakini) des contreforts de l’Himalaya alors qu’il fait un voyage pour ramener un peu d’eau pure des sources du Gange à sa grand-mère. Cette jeune femme simple et innocente s’appelle Ganga, comme le fleuve (Ga ?g ?) dans lequel les hindous se purifient.

Ils se promettent l’un à l’autre dans un temple et consomment leur nuit de noces. Puis Naren repart à Calcutta rechercher la bénédiction de sa grand-mère, en promettant de revenir pour épouser Ganga aux yeux de tous. Mais lorsqu’il arrive chez-lui, il comprend que son union a été scellée avec la fille de Bhagwat Choudhary (Raza Murad), un homme politique aussi puissant que corrompu. Le jeune homme est piégé sans possibilité de retourner dans la montagne chercher Ganga.
Quelques mois plus tard, la jeune femme désespérée donne naissance à un fils et entame un périple pour retrouver Naren à la ville…

Comme d’autres œuvres de Raj Kapoor, Ram Teri Ganga Maili est profondément féministe. Il va plus loin en liant explicitement la Femme à Dieu et à l’Inde. Le mépris des femmes est montré comme une défiance vis-à-vis du Ciel comme de la patrie.
Ce fut un triomphe commercial et critique qui a obtenu cinq Filmfare Awards dont le quatrième pour Raj Kapoor comme réalisateur. Beaucoup ne se souviennent cependant du film que pour une chanson de sari mouillé transparent. Le comité de censure n’a pas objecté ce qui a surpris à l’époque. Peut-être a-t-il estimé qu’elle renvoyait en réalité les spectateurs masculins indiens à eux-mêmes, s’inscrivant ainsi complètement dans le message du film.

La chanson : Ek Dukhiyari Kahe de Ravindra Jain
Pour plaire à Bhagwat Choudhary, un politicien corrompu de Calcutta, les propriétaires d’un khota de Bénarès lui offrent une danse de Ganga, leur nouvelle courtisane. La malheureuse jeune femme a échoué là alors qu’elle avait quitté sa montagne pour rechercher Naren, le père de son fils. Elle est traitée comme une prostituée et chante son désespoir comme sa révolte. Pour la première fois peut-être, les hommes qui sont venus hypocritement se « divertir » baissent les yeux…

Cette chanson magnifique résume avec force le message du film. Elle ne peut être comprise que lorsqu’on réalise que la chanteuse se nomme comme le fleuve purificateur et la déesse qui le personnifie. Elle parle tout à la fois d’elle-même, des femmes et de l’Inde.
Note : le fleuve Gange est féminin en hindi mais masculin en français, ce qui peut rendre les sous-titres difficiles à suivre.

Ek Dukhiyari Kahe chantée par Lata Mangeshkar pour Mandakini


Ankush

Année : 1986
Réalisation : N. Chandra
Avec : Nana Patekar, Madan Jain, Nisha Singh et Arjun Chakraborty
Box Office : n°50, Super Hit

Le film : Pour son premier film, N. Chandra a courageusement réalisé Ankush (un ankush est un aiguillon utilisé pour cornaquer les éléphants), un film réaliste qui s’inscrit sans aucun doute dans le mouvement du parallel cinema. Sous couvert d’interroger une justice aveugle, il donne à voir le quotidien désespérant de jeunes hommes désœuvrés, rejetés par une société profondément injuste qui méprise ses enfants.

Ravi (Nana Patekar) avait fini en prison pour avoir dénoncé la tricherie d’un élève aux examens. Il est devenu comptable d’un bookmaker clandestin. Arjun (Arjun Chakraborty) est au chômage depuis trois ans malgré son diplôme d’ingénieur. Shashi (Madan Jain) ne trouve plus de travail depuis qu’il a été licencié pour avoir mené une grève. Laliya (Suhas Palshikar) enfin, est un ancien gosse des rues orphelin qui subsiste sous la protection de Ravi, son « grand frère ».
Les quatre jeunes tiennent les murs avec application dans un quartier pauvre de Bombay, n’hésitant pas à faire le coup de poing de temps en temps avec une bande rivale.
Leur destin change lorsque leur ancien squat est loué par une veuve (Ashalata Wabgaonkar) et sa petite-fille Anita (Nisha Singh). Ils leur font bien une méchante farce pour tenter de les chasser, mais les deux femmes tiennent bon et elles finissent par les happer. Ils se retrouvent pris au piège de leur gentillesse, de leur honnêteté et du sourire lumineux d’Anita. Pour la première fois de leur vie, ils sont considérés avec bienveillance. L’espoir renaît et ils se mettent au travail.
Mais tout bascule lorsqu’Anita est sauvagement agressée…

Ankush est un film juste, prenant et émouvant, interprété par des acteurs habités. Nisha Singh comme Nana Patekar sont remarquables. Même tourné avec très peu de moyens, N. Chandra a dû hypothéquer sa maison pour le produire. Il a heureusement pu recouvrer très largement son investissement, en particulier grâce à la chanson Itni Shakti Humen De Na Daata qui est devenue un véritable tube.

La chanson : Itni Shakti Humen De Na Daata de Kuldeep Singh et Abhilash
Anita a extirpé Laliya des griffes d’un policier vindicatif et l’a amené chez elle pour le soigner. Sa grand-mère en a profité pour faire venir dans la maison les trois autres qui guettaient dehors un peu honteux. Ils se sont alors raconté leurs tristes histoires jusqu’à la tombée de la nuit. Au moment d’allumer la lumière, la tradition veut qu’une prière soit chantée…

Itni Shakti Humen De Na Daata chantée par Sushma Shrestha et Pushpa Pagdhare


Mr. India


Année : 1987
Réalisation : Shekhar Kapur
Avec : Anil Kapoor, Sridevi, Amrish Puri, Satish Kaushik et Sharat Saxena
Box Office : n°2, Hit

Le film : Salim-Javed, le duo d’auteurs formé par Salim Khan et Javed Akthar, s’est séparé en 1982 mais c’est un de leurs scripts que Shekhar Kapur réalise pour le plus grand bonheur des spectateurs en 1987. Vaguement inspiré des James Bond de l’époque Roger Moore et dans la même veine que Shaan qu’ils avaient écrit en 1980, leur Mr. India est un divertissement jubilatoire qui mélange allègrement les genres sans se prendre au sérieux une seule seconde.

Tout commence un peu comme dans Brahmachari, Arun Varma (Anil Kapoor) mène une sorte d’orphelinat privé dans une grande maison qu’il loue près de la plage. Les cours de violon qu’il donne ne suffisent bientôt plus à nourrir tous les orphelins qu’il a recueillis et il doit se résoudre à louer une chambre à une journaliste, la pétillante Seema Sahni (Sridevi). En parallèle, Arun apprend par un vieux scientifique (Ashok Kumar) que juste avant de mourir, son père avait réussi à construire une machine d’invisibilité qui se présente sous la forme d’une grosse montre.
La grande maison d’Arun est convoitée par Mogambo (Amrish Puri) un général fou et mégalomane, mafieux à ses heures et qui rêve de détruire l’Inde pour mieux l’asservir. Il tente de faire chasser le jeune homme et ses petits orphelins mais c’est sans compter sur Seema qui s’introduit par le plus grand des hasards dans le repaire du sinistre bandit. Elle est sur le point de se faire tuer, voire pire encore, quand Arun vient la sauver. Pour mieux terroriser les crapules et éviter de se faire lui-même massacrer, le jeune homme utilise astucieusement le pouvoir de sa montre et pour garder le secret de son identité, se fait appeler « Mr. India ». Seema ne le voit pas et ne sait pas qu’il s’agit d’Arun, mais elle tombe instantanément amoureuse de ce super-héros d’un nouveau genre…

L’histoire est aussi tarabiscotée qu’invraisemblable mais elle n’a pas d’importance car elle ne sert qu’à offrir aux acteurs des morceaux de bravoure qui sont restés dans toutes les mémoires. Amrish Puri est un Mogambo génial, Sridevi une sorte de délicieuse Lois Lane qui danserait entre deux enquêtes et Anil Kapoor un super-héros fragile et finalement assez touchant.
On a parfois écrit que Mr. India était un film patriotique ce qui est probablement discutable. Il est par contre certain qu’il est aussi indien que Fantomas peut être français ou James Bond anglais.

Comme nombre de réussites commerciales, Mr. India a été refait avec succès dans d’autres régions de l’Inde. Une version tamoule, En Rathathin Rathame, ainsi que kannada, Jai Karnataka, sont ainsi sorties en 1989. Dans cette dernière, les chansons ont conservé la musique originale de Laxmikant-Pyarelal, ce qui est plutôt rare pour l’époque, et qui permet d’entendre l’actrice principale Rajani, débuter elle aussi Hawa Hawaii avec les paroles absurdes devenues cultes de Javed Akhtar :
    Awi wiwi wiwi wi
    Chee ho ho Honolulu lu lu lu lu, Honolulu
    Hing bekei Hong Kong, King Kong
    I seenoosi, yusiloosi, hassi tosi, lassi pissi
    Mombaasa, ping pong

La chanson : Kate Nahi Katate Ye Din Ye Raat de Laxmikant-Pyarelal et Javed Akhtar
Seema et Mr. India/Arun se sont donnés rendez-vous. Elle est amoureuse du redresseur de tords invisible mais regarde à peine Arun. Ce dernier est attiré par la jeune journaliste mais ne peut pas lui avouer son identité secrète. L’interview se transforme en chanson où ils dévoilent leurs sentiments…

Sridevi brûle l’écran dans cette chanson devenue si célèbre que son « I Love You » a été utilisé comme leitmotiv dans Maine Pyar Kiya sorti deux ans plus tard.

Kate Nahi Katate Ye Din Ye Raat chantée par Kishore Kumar et Alisha Chinai


Qayamat Se Qayamat Tak


Année : 1988
Réalisation : Mansoor Khan
Avec : Aamir Khan, Juhi Chawla, Dalip Tahil, Goga Kapoor et Alok Nath
Box Office : n°6, Super Hit

Le film : Les tragédies avaient presque disparu des écrans indiens depuis la fin des années 1950, probablement parce qu’il se dit que comme partout ailleurs, les spectateurs préfèrent les histoires où les héros triomphent de l’adversité.
Qayamat Se Qayamat Tak (le titre peut se traduire par « De catastrophe en catastrophe », mais le mot Qayamat a en urdu un sens plus fort car il fait référence au jugement dernier, se rapprochant d’« apocalypse ») constitue donc un pari osé pour lancer le jeune Aamir Khan dans le grand bain de Bollywood.

Le premier des trois Khan débute en fanfare son extraordinaire carrière dans un remarquable film écrit et produit par son oncle, Nasir Hussain à qui l’on doit des succès aussi importants que Teesri Manzil, Caravan, Yaadon Ki Baraat ou Hum Kisise Kum Naheen. Il raconte un drame d’amour impossible qui plonge ses racines aussi bien dans le mythe de Pyrame et Thisbé dont est dérivé Roméo et Juliette, que Mirza Sahiban déjà plusieurs fois adaptés à l’écran.

Deux familles menées par Randhir Singh (Goga Kapoor) et Jaswant Singh (Alok Nath) se haïssent depuis que Dhanraj Singh (Dalip Tahil), le frère de Jaswant a abattu Rattan, le frère de Jaswant. Mais un jour, Raj (Aamir Khan), le fils de Dhanraj, fait la connaissance de Rashmi (Juhi Chawla), la fille de Randhir. Les deux jeunes tombent follement amoureux l’un de l’autre et décident de s’enfuir pour se marier, mettant en rage les patriarches des deux familles…

Sans totalement renouveler un genre multi-millénaire, le drame est original à plusieurs titres. La mécanique infernale parfaitement huilée est pour une fois décrite sans que la vraisemblance soit (trop) mise à mal. Le film n’a de ce fait que peu vieilli. Il stigmatise également de la barbarie des crimes d’honneur en présentant des personnages sensibles qui prennent fait et cause pour les deux amants et tentent d’éviter une fin qui semble inéluctable. Ceux-ci sont incarnés par deux acteurs inspirés qui ont l’âge du rôle et sont mis en avant à égalité. Le jeune homme n’est pas plus rebelle que la jeune femme. Elle ne s’en laisse pas compter et n’est pas une petite chose fragile. Ils incarnent à eux-deux un espoir d’évolution de la société indienne dans laquelle de telles histoires sont encore malheureusement presque quotidiennes.

La chanson : Ae Mere Humsafar de Anand-Milind et Majrooh Sultanpuri
Raj a promis à Rashmi de l’emmener le jour de son anniversaire, le 22 octobre. Ils attendent plein d’espoir la date fatidique…

Ae Mere Humsafar chantée par Udit Narayan et Alka Yagnik pour Aamir Khan et Juhi Chawla


Maine Pyar Kiya


Année : 1989
Réalisation : Sooraj R. Barjatya
Avec : Salman Khan, Bhagyashree, Alok Nath et Reema Lagoo
Box Office : n°1, All Time Blockbuster

Le film : Après Aamir Khan propulsé par son oncle dans Qayamat Se Qayamat Tak, c’est au tour de Salman Khan d’atteindre le firmament dans Maine Pyar Kiya. Le fils de Salim Khan, la moitié du duo d’auteurs Salim-Javed à qui l’on doit Sholay, avait déjà fait ses débuts dans un second rôle l’année précédente mais on peut considérer que Maine Pyar Kiya (« Je suis tombé amoureux ») est son véritable film de lancement. Il s’agit de la première réalisation de Sooraj R. Barjatya, et la jeune première Bhagyashree venue de la télévision, apparaît pour la première fois sur le grand écran. Comme il se doit, chaque plan est à la gloire de Salman.

Il semble que Sooraj R. Barjatya ait mis presqu’un an pour écrire une histoire qui ressemble par certains côtés à celle de Betaab, le film de lancement de Sunny Deol. Elle raconte l’amitié brisée du modeste Karan (Alok Nath) et du riche Kishan (Rajeev Verma) sous l’influence maléfique d’un aigrefin qui rêve de marier sa fille à Prem (Salman Khan), le fils de Kishan. Ce dernier est tombé amoureux de Suman (Bhagyashree) la fille de Karan, mais leur mariage est impossible du fait de la différence de statut social.
Prem commet alors l’impensable : il se révolte et quitte la maison familiale pour se rendre chez Karan demander la main de Suman. Karan ne croit pas l’amour de Prem sincère et le soumet à une épreuve difficile, gagner comme lui à la sueur de son front 2000 roupies par mois. Le jeune homme ne se démonte pas, refuse l’argent que lui offre sa mère (Reema Lagoo) et se met au travail…

Le public a fait un triomphe au film. La critique n’a pas été en reste et le film a remporté six Filmfare Awards. Il peut pourtant laisser sceptique ceux qui résistent au charme de Salman. Le jeune homme, bien qu’énergique, ne sait pas plus jouer que Bhagyashree. Heureusement, Maine Pyar Kiya donne à (re)voir tout un tas de reliques des années 1980 telle qu’un walkman ou des posters incroyables comme celui de Samantha Fox.

La chanson : Mere Rang Mein Rangne Waali de Raamlaxman et Dev Kohli
C’est l’anniversaire de Suman et malgré les difficultés, Prem est au rendez-vous sur la terrasse de sa maison. Il lui a offert une robe et chante son amour…

Le directeur musical Raamlaxman, de son vrai nom Vijay Patil, était le « Laxman » du duo Raam-Laxman qu’il formait avec son ami Raam. Ce dernier est mort en 1976 et Vijay a continué seul sous le nom de Raamlaxman. Il a obtenu un Filmfare Awards pour Maine Pyar Kiya mais on peut s’interroger quand on réalise qu’il est difficile de trouver une seule chanson dont il puisse revendiquer l’entière paternité. Mere Rang Mein Rangne Waali intègre par exemple entre-autres une portion du Final Coundown d’Europe et la mélodie principale de Love Story de Francis Lai.

Mere Rang Mein Rangne Waali chantée par S.P. Balasubrahmanyam pour Salman Khan

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