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Delhi-6

Publié vendredi 20 février 2009
Dernière modification jeudi 19 février 2009
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Par Jordan White

Rubrique Albums
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AR Rahman a enflammé les charts durant l’année 2008 avec des BO plus ou moins convaincantes sur le plan artistique mais trouvant à chaque fois leur public. En 2009, il nous propose de voyager à Delhi avec sa BO de Delhi-6 dont la promotion bat son plein depuis la mi-janvier. Est-elle à la hauteur des attentes après les déceptions Yuvvraaj et Ghajini ?

En préambule, un petit aparté concernant Delhi-6 : la déception fut d’abord grande en découvrant les neuf morceaux du disque. Comme un rendez-vous manqué. La déception laissa place à la frustration. Mais il y eut un sentiment plus fort, celui de vouloir réécouter, avec l’adage selon lequel il faut toujours se repencher sur ce qui a pu nous décevoir pour essayer de comprendre et in fine apprécier ce que l’on pouvait de prime abord sinon repousser du moins considérer comme décevant. Fin de l’aparté.

Il est aisé d’attendre toujours le petit plus de ses idoles et plus simplement des gens que l’on peut admirer. Un album qui vous a marqué, qui a accompagné un moment de votre vie, tout comme les films qui font partie de votre parcours de cinéphile sont des souvenirs précieux. AR Rahman est un musicien talentueux, parfois génial, souvent accessible et doué. Mais il lui arrive de faire moins bien, de faire en deçà de ce qu’il a pu produire de meilleur. Ca semble logique. Et l’on se conforte facilement (peut-être trop) derrière l’idée de l’apothéose passée (Lagaan, Guru, etc.). Au risque de ne pas laisser assez de temps pour le présent Delhi-6).

Delhi-6 commence très bien et très fort.
Masakali est en effet incontournable. Sa facture classique (instrumentation à base de tablas et de dhols, harmonium), la voix à la fois douce et chaude de Mohit Chauhan, lequel délivre le même plaisir d’interprétation d’album en album en marquant un grand coup avec Ugly aur Pagli et le titre Yaad Teri Aaye. Masakali c’est du AR Rahman pur jus : ligne de basse puissante sans ruiner les autres instruments, rythme mid-tempo, voix quasiment sacralisées, sérénité de tous les instants, ambiance très chaude, "coconée", avec plein de petits détails (ici 3 min 05 s à 3 min 12 s). Il est dit que Delhi-6, l’album et le film rendent un vibrant hommage à Delhi, la ville, en en faisant le personnage central du film.

Rahman qui aime composer des qawalis, chants dévotionnels (les ghazals également, lesquels sont des chants profanes et peuvent aussi être sacrés : célébrer l’amour pour une promise comme l’amour pour Dieu) s’adjoint les services de Kailash Kher pour Arziyan, un morceau de 8 min 45 s montant crescendo. Une durée très rare dans une BO - un qawali de 10 minutes, voire plus n’étant quant à lui pas quelque chose d’inédit - qui rappelle les morceaux-fleuves de Mohabbatein dont le fameux Soni Soni qui justement faisait à peu près 9 minutes, un morceau de Holi génial.

La surprise vient du morceau Dilli 6, très jeune dans l’esprit, peut-être le meilleur morceau du disque, utilisant un son électro prégnant, avec un beat très minimaliste et un refrain tout aussi classique. D’où vient son charme ? C’est ce qui va surprendre l’auditeur, français qui plus est : entendre Vivienne chanter en français dans le texte durant les premiers couplets et après le premier refrain. Les paroles sont très basiques, mais c’est étonnant d’avoir un mélange hindi/français dans une BO indienne. La pemière phrase de la chanson, Yeh dilli hai meri yaar, bas ishq mohabbat pyaar, devrait très rapidement être une des répliques-cultes de l’année, d’autant que ça se fredonne et se retient très facilement.

Synthé planant tout comme la voix du chanteur lui-même, un certain AR Rahman qui se fait plaisir avec un morceau qui sonne très 90’s, Rehna Tu. Là encore une fois c’est le refrain qui fait la différence, comme il le faisait pour Jai Ho sur Slumdog Millionaire : couplet basique et refrain efficace qui appelle une certaine ferveur populaire, en tout cas la vise.

Les échos de Ghajini et Yuvvraaj surtout sont encore là, tout comme ceux de Shano Shano, avec Yeh Kaala Bandar : sonorités r’n’b voire hip-hop se confondent. On pense à Bekha également. Cette façon de marier le son urbain et l’électro (au niveau du rythme) paie une fois sur deux, et ce en dépit d’un flow un peu caricatural.

Les trois derniers titres sont tous intimistes, délaissant les tempos soutenus des débuts pour aller chercher l’acoustique et une forme d’épure qui conviendrait parfaitement à un film laissant entendre qu’il traite d’un voyage introspectif, à mi-chemin entre modernité et tradition. C’est le cas pour Dil Gira Darafan mais aussi Genda Phool, qui vient cependant trahir les quelques mots du dessus concernant le rythme, plus enlevé ici, lequel fera danser Waheeda Rehman.

Une BO pas forcément très simple d’accès à la première écoute (il faut revenir dessus), qu’il est conseillé de réécouter plusieurs fois pour l’apprécier à sa juste valeur. Et il reste encore les images, le son, le décor du film, pour que tout cela prenne de l’ampleur. Aucun livret dans le cd, juste une jaquette "miroir". C’est dommage, il aurait pu y avoir de belles photos.

La Bande-Annonce du Film :


2009

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