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Retour sur le FFAST 2016

Publié samedi 26 novembre 2016
Dernière modification mardi 29 novembre 2016
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Par Gandhi Tata

Rubrique Événements
◀ Ranveer Singh et Vaani Kapoor à Paris, pour la promotion de Befikre

Mardi 18 octobre 2016 à 19h, nous nous sommes rendus avec Kendra, à la soirée d’ouverture de la 4e édition du FFAST. Ce qui faisait l’évènement de cette inauguration, c’était bien sûr la présence de l’acteur indien, Manoj Bajpayee, venu présenter Aligarh, un film engagé contre l’homophobie de la société indienne.




C’est au cinéma l’Arlequin que cette prestigieuse soirée d’inauguration s’est déroulée, avec un cocktail d’accueil qui s’est tenu entre 19 et 20h. Autour d’un lassi sucré, saveur mangue et de délicats mets, comme des parts individuelles de gratin à la pomme de terre épicée, cuisiné à l’indienne, nous avons eu la chance de retrouver quelques connaissances, passionnées comme nous, de cinéma indien et échanger à propos de cette nouvelle édition du FFAST. Parmi les convives, figurait l’invité d’honneur du festival, Manoj Bajpayee, qui conversait en toute décontraction, avec les organisateurs et se prêtait volontiers à faire des selfies avec des invités, aussi impressionnés que conquis par la disponibilité et la gentillesse de la star.




L’heure, c’est l’heure, et les festivaliers n’étaient heureusement pas calés sur l’heure indienne, puisque l’évènement a démarré comme prévu, avec l’accueil des spectateurs dans la magnifique salle Panorama du cinéma l’Arlequin. Ces derniers ont pu découvrir les membres des jurys FFAST 2016 et étudiants, et écouter l’intervention de Manoj Bajpayee avant la présentation de son dernier film, Aligarh d’Hansal Mehta.






Au cours de son discours, l’acteur a pu revenir sur son investissement dans ce projet controversé et les difficultés rencontrées au moment de sa sortie. Il a notamment évoqué le rôle trouble du comité indien de la censure, qui a octroyé le certificat A (contenu adulte) à la bande-annonce du film, le condamnant ainsi aux oubliettes, car aucune chaîne de télévision et aucune salle de cinéma n’a eu le courage de promouvoir Aligarh. Manoj a également déploré la faible distribution du film en Inde, dans seulement 250 salles, alors qu’il a été paradoxalement encensé par les critiques. L’enthousiasme du public français venu assister à la projection, a visiblement touché l’acteur, qui a condamné la frilosité et l’hypocrisie des spectateurs indiens, ne voulant pas être vu en train d’acheter un billet, pour un film traitant d’un sujet sur l’homosexualité.




Le présentateur de la soirée a introduit cette nouvelle édition comme étant un voyage et c’est effectivement le cas. Ce rendez-vous cinéphile, a donné l’occasion de découvrir plusieurs films en compétition, en provenance de tout le sous-continent : Inde, Pakistan, Népal, Bangladesh. D’ailleurs, après le Népal en 2014 et le Pakistan en 2015, c’est le Bangladesh qui était à l’honneur avec un focus pour mettre en avant un cinéma, bien trop peu connu en France.


Cette année, le navire du FFAST a largement renouvelé son équipage, à l’exception de son capitaine, Jean-François Thermoz, fidèle à la barre, et animé de la même passion, avec laquelle il a lancé l’aventure en 2013. Qui dit nouvelle équipe, dit nouvelle orientation et nouvelle vision. Et cette dynamique, on l’a très vite ressentie, en découvrant sur le nouveau poster de l’évènement, l’absence du terme Transgressif, au profit d’un intitulé plus simple, Festival du Film d’Asie du Sud. Alors pourquoi ne pas rebaptiser le festival en FFAS ? Et pourquoi conserver l’acronyme FFAST ? Tout simplement, parce que cette 4e édition est celle de la transition et à l’image de ce renouvellement d’équipe avec le même président, à sa tête, ce visuel reflète à la fois, l’identité passée du festival avec ce sigle du FFAST, devenu une véritable marque et ce qu’elle aspire à devenir : un évènement global, qui présente un véritable panorama du cinéma dit parallèle de l’Asie du Sud.



La sélection de cette année a justement voulu présenter une vue d’ensemble de ces industries d’Asie du Sud, en projetant des films de genres divers, à la fois engagés et transgressifs, mais toujours issus de ce courant cinématographique marginal où les codes du cinéma commercial ne sont pas respectés.

Cette année, cinq films se sont affrontés en compétition pour remporter le prix FFAST 2016. Au programme, trois films indiens, un documentaire pakistanais et un long-métrage en provenance du Bangladesh : Psycho Raman, Under Construction, Aligarh, Kothanodi et Song of Lahore. En plus des films en compétition, les spectateurs ont pu découvrir une sélection de films faisant partie de deux focus « Bangladesh » et « Migrations ».


Bande-annonce 4eme édition FFAST par FestivalduFilmdAsieduSud

Même si l’intitulé a quitté l’identité visuelle du festival, le thème de la transgression était largement présent dans la programmation de cette 4e édition. Tout d’abord, la transgression des genres comme dans The Red Door où nous étions invités à pousser une étrange porte rouge pour un voyage mystique à la découverte des vies antérieures d’un Bhoutanais. Il y avait aussi celle des codes avec Psycho Raman et son tueur psychopathe qui est un personnage principal atypique, à mille lieues des héros stéréotypés des productions Bollywood. Le récit de ce très bon Kashyap, qui suit l’affrontement d’un jeune inspecteur aussi brillant que dérangé face à l’inquiétant Raman Raghav, dans un jeu dangereux et sanglant, constitue une transgression des a priori sur le cinéma indien, trop souvent réduit au kitsch ou à un certain goût pour les paillettes.


Transgression dans la forme ou le fond ? Si dans ses premières éditions le FFAST nous a proposé davantage de films de genre issus du cinéma indépendant, les long-métrages choisis cette année, ont eu cette qualité assez rare, d’aborder des sujets transgressifs de manière différente et innovante. Cette fois, on a pu trouver l’aspect transgression dans le fond, et plus précisément dans le choix des problématiques, avec des films souvent engagés qui brisent les tabous sociaux, en traitant de nombreux sujets tabous comme dérangeants. La condition de la femme en Inde était sur la table avec la programmation de Leeches, où le combat d’une jeune femme pour arracher sa sœur du triste sort d’un mariage forcé était au cœur de l’intrigue. De la cause féministe, à la cause homosexuelle, il n’y a qu’un film, et ce fut le fameux Aligarh avec Manoj Bajpayee qui a ouvert de belle manière ce festival. Ce long métrage grave et engagé, sur l’homophobie de la société indienne conservatrice, s’est attaché à présenter dignement, la lutte désespérée d’un homme courageux, le Dr Shrinivas Ramchandra Siras, pour le respect, la dignité et le droit d’exister.


Le FFAST est loin d’être un évènement élitiste qui n’aborde que des problèmes sociétaux et problématiques avec des films expérimentaux et exigeants. Depuis ses débuts, les festivaliers ont toujours mis l’accent sur une programmation reflétant la production cinématographique du sous-continent indien dans toute sa diversité et proposer ainsi des séances rétro, valeurs sures et autres blockbusters des industries phares comme Bollywood ou Kollywood.

On a ainsi eu droit à la soirée IN BED WITH SRK qui s’est déroulée au Reflet Médicis durant toute la nuit du vendredi 21 octobre. Pour l’occasion, l’équipe du festival a décidé de nous faire frissonner de plaisir avec deux des récents succès de l’acteur : Jab Tak Hai Jaan & Fan ! On a pu aussi redécouvrir la comédie dramatique Umrika dans le focus Migration et le classique d’Anurag Kashyap, Gang of Wasseypur, Part 1, qui a redonné ses lettres de noblesse au genre des films de gangsters indiens.


Le palmarès du FFAST était à l’image de sa programmation éclectique, puisque qu’il a récompensé des films de pays et de genres différents, avec une volonté de soutenir une petite industrie du cinéma comme celle du Bangladesh, encourager les premiers films et confirmer avec ce podium plutôt engagé, la nouvelle orientation de cette nouvelle équipe pour un FFAST beaucoup plus transgressif dans le fond et les propos.


Le prix du public a été remis au film documentaire sur un groupe de musique pakistanais, Song of Lahore. Le jury étudiant a choisi de récompenser Kothanodi, pour son audace, sa singularité et la volonté de transmission d’une mémoire populaire par un univers visuel et sonore assez puissant. Enfin, le prix du jury du FFAST a été remis à deux films, Under-construction et Aligarh. La réalisatrice Rubaiyat Hossain, ainsi que son actrice principale Shahana Goswami, étaient présentes pour recevoir le prix d’Under-construction, alors que Manoj Bajpayee a remercié le jury pour avoir primé Aligarh, via un message vidéo projeté avant la présentation du film de clôture, Joker.






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