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Jhoom Barabar Jhoom

Traduction : Danse sans arrêt

Bande originale

Jhoom
Kiss of Love
Ticket to Hollywood
JBJ
Bol Na Halke Halke
Jhoom Barabar Jhoom
Jhoom Jam (instrumental)

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Fiche IMDB
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La critique de Fantastikindia

Par Jawadsoprano, Lalita
Publié le 15 mai 2008

Note :
(6/10)

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Harry rencontre Sally dans un film au scénario qui tient sur un post-it mais le résultat est finalement assez divertissant et original.

Construit en partie autour d’une conversation entre deux inconnus, Jhoom Barabar Jhoom reprend les thèmes chers à Shaad Ali, son réalisateur. Tout comme Bunty aur Babli (son deuxième succès après Saathiya), le film est une variante intéressante sur l’histoire de jeunes de la classe moyenne venant de petites villes, qui rêvent de partir pour la Grande et atteindre la gloire. Pourtant contrairement aux clichés consacrés du provincial naïf, ce ne sont jamais de doux agneaux qui partent à l’aventure. Roublards et passionnément matérialistes, les personnages d’Ali donnent rarement à voir leurs meilleurs traits de caractère car ils s’estiment toujours trop bien pour la vie qu’ils mènent. Ici, le réalisateur prend le parti d’exposer cette vanité autour d’une banale tasse de café dans une gare londonienne. En racontant leurs rencontres avec leurs fiancés respectifs, Ricky (Abhishek Bachchan) et Elvira (Preity Zinta) vont donc se défier. But de la joute : en dehors du fait de se vanter de vivre une relation intense avec un être parfait, crier haut et fort d’avoir tiré le "gros lot" qui les fera sortir de l’anonymat d’une vie ordinaire.


Ricky, escroc à la petite semaine, rencontre Anaïda (Lara Dutta) qui travaille au Ritz. Pourtant elle tombe amoureuse de lui, et il la séduit devant une Tour Eiffel étincelante. Si c’est pas de la classe ça ! Si c’est pas de l’éclate ! Mais Elvira surenchérit : Steve (Bobby Deol) la sauve de justesse de la mort (oh il est fort !), possède un hummer/ limousine (oh il est riche !), et un don irrésistible pour le massage. Elle, qui a pourtant juré enfant de n’épouser qu’un Anglais pure souche une fois adulte (conception raciale de la réussite sociale assez controversée mais toujours valable pour beaucoup plus de gens qu’on ne le croit), tombe amoureuse d’un homme à moitié pakistanais dont le compte en banque a le don de faire disparaître tous ses défauts. Un portrait peu flatteur et assez drôle de deux cupides sans complexe, d’autant plus qu’ils ont trouvé en l’autre leur double.

Idée amusante sur le papier, et qui fait preuve d’une originalité dont le public indien est actuellement friand. Mais un délire scénaristique suffit-il pour faire un film de plus de 2h ?
Visiblement pas pour en faire un film marquant, car ce sujet au départ prometteur, censé donner lieu à une comédie mordante, est desservi par un sérieux manque de rythme. Un défaut qui n’est jamais compensé, ni par les dialogues (une phrase percutante toutes les deux secondes est nécessaire dans ce genre de films), ni par les nombreux clips. La première partie est en effet ponctuée par les apparitions musicales d’Amitabh Bachchan. Ce n’est même pas un personnage, même pas le narrateur… juste un type habillé d’une veste en loques fashion, d’un chapeau à plume et de bottes à la Jack Sparrow, qui danse. Le summum de la classe pour certains créateurs de mode qui ont essayé de "nous éclater" avec un Big B new look. Le summum du ridicule aussi (que ne ferait-on pas pour son fils…).

La deuxième partie se déroule elle aussi en dents de scie. Après avoir créé un délire visuel et appréhendé l’histoire avec un ton décalé, le réalisateur devient subitement sérieux et s’engage dans une histoire d’amourette vue et revue. De plus, il casse le rythme avec un concours de danse beaucoup trop long qui nous donne l’occasion d’écouter trois versions différentes de la chanson-titre. Si vous n’avez pas aimé la version bhangra, tapez-vous le remix ! Sinon, attendez-vous après la pause à vous éclater sur la version live !
Ne reste après cela que quelques clins d’œil au cinéma des années 70 (notamment avec la réunion à l’écran des fils d’Amitabh Bachchan et Dharmendra, les deux stars figurant au générique du mythique Sholay) et des prestations d’acteurs plutôt satisfaisantes : la réelle surprise vient de Lara Dutta qui joue juste tout le long du film et qui nous régale d’un accent "frenchie" très bien maîtrisé. Les autres prestations sont plus diverses. Ainsi Bobby Deol renaît dans un registre inattendu, la comédie, mais Preity Zinta et Abhishek Bachchan nous laissent un peu sur notre faim. Ils ne sont pas mauvais, mais reprennent des attitudes et des mimiques maintes fois utilisées dans certains de leurs précédents rôles.


Malgré ses nombreux défauts, Jhoom Barabar Jhoom reste un film attachant et sympathique. D’une part, les risques pris par Shaad Ali pour satisfaire une production Yash Raj sont assez déroutants. Etre en décalage constant pendant une bonne partie du film, en inventant, en délirant et en s’amusant, est carrément osé de la part d’un réalisateur pourtant dépendant des directives de la maison de production numéro uno en Inde. On peut d’ailleurs s’interroger sur la liberté presque totale qui lui a été attribuée. Le succès énorme de Bunty Aur Babli a sans doute joué en sa faveur pour être pratiquement indépendant artistiquement. Personnellement, nous n’aurions pas misé une cacahuète sur le film après l’avoir visionné, on peut donc supposer que le producteur Aditya Chopra a voulu surprendre le public. Pour une surprise, ce fut une surprise… Le public a complètement boudé le film puisque celui-ci a réalisé des scores faméliques en Inde comme à l’étranger, où aucun des publics visés ne s’y est intéressé.


La musique n’est pas transcendante mais totalement dans l’air du temps des productions bollywoodiennes actuelles (retrouvez ici, la critique complète de Jawadsoprano). Les clips retranscrivent visuellement le grain de folie qu’essaye de mettre Shaad Ali dans son film sans jamais y parvenir. Jhoom Barabar Barabar est un feu d’artifice pour le coup kitsch (mais si, j’ose le dire) et en plein retour disco ; Ticket to Hollywood est un numéro de danse plus classique qui a la particularité d’avoir été tourné à Paris (on reconnaît le Louvres, le Trocadéro, la Tour Eiffel, les berges de la Seine, l’Arc de Triomphe… retrouvez le dossier sur le tournage du film à Paris ici) ; Kiss of Love est tout aussi extravagant et prend la forme d’un procès (attenté par Elvira au musée Madame Tussaud après qu’elle eut failli recevoir une statue de Superman sur le crâne… regardez le film pour plus de détails). Mais Bol Na Halke, la fameuse ballade au pied du Taj Mahal, est un véritable coup de cœur et sans doute l’une des plus belles chansons de l’année. De plus, le Taj Mahal devient ici (au plus grand étonnement du public indien) le monument exotique et romantique ultime pour ses deux expatriés. Un intelligent pied de nez à la longue tradition des décors suisses qui ont fait les beaux jours des films Yash Raj.

Pour conclure, on regrette que ce film moyen mais de facture correcte ait connu un destin tragique au box-office. Sans doute a-t-il été desservi par l’image prestigieuse de Yash Raj, qui a habitué le public à un certain niveau de production. Jhoom Barabar Jhoom aurait dû être réalisé de manière moins grandiloquente pour avoir un impact plus fort. Malgré tout, on peut conseiller ce film aux gens désireux de regarder un film décalé, original et assez futile. Tant de particularités qui en raviront certains, et en rebuteront d’autres.

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