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Padmaavat

Traduction : À propos de Padmaavati

Bande originale

Ghoomar
Ek Dil Ek Jaan
Khalibali
Nainowale Ne
Holi
Binte Dil

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La critique de Fantastikindia

Par Brigitte Leloire Kérackian
Publié le 5 février 2018

Note :
(7/10)

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En avant-première, Padmaavat était projeté au Palladium Mall, à Bombay, devant un public de journalistes. Enfin, la dernière réalisation du célèbre Sanjay Leela Bhansali était sur écran en format 3D.

La photographie est sublime et emporte le spectateur dans un univers historique et romancé. Les maîtres musulmans de Delhi sont rudes, sombres, avides de pouvoir et de richesses, en contraste avec le souverain rajpoute qu’on nous fait découvrir.

Le guerrier Khilji ne rêve que de renverser le sultan et atteindra son but. L’écrin enchanté dans lequel vont se rencontrer le roi Ratan Singh et la belle Padmavati n’a rien à envier aux plus beaux décors des contes de fées. La transparence de l’image et ses effets doux posent nos personnages en purs héros. Le roi se marie bien vite avec sa Diane chasseresse parée des plus beaux atours dans son palais, où l’attend sa première épouse désabusée.

Un sombre guru (sage) s’entiche de la beauté de Padmavati et est vite banni par le roi. Assoiffé de vengeance le guru attise l’attrait du pouvoir et du lucre du nouveau sultan de Delhi en lui vantant la beauté de la reine : la posséder serait un atout dans l’étendue de sa puissance. Ne pouvant la posséder, l’affliger des pires affronts sera sa revanche.

Les sièges, les batailles et les ruses vont ponctuer le long combat entre le terrible sultan Alauddin Khilji (Ranveer Singh) et le roi Ratan Singh (Shahid Kapoor) . « L’honneur avant la vie ou Pas de vie possible sans honneur ! » Voilà la devise des rois rajpoutes du nord de l’Inde au 13ème siècle. Des valeurs de la chevalerie de l’époque, nobles, mais inefficaces pour se débarrasser d’un affreux personnage prêt à toutes les bassesses pour obtenir la vision de la princesse (Deepika Padukone) et au final l’humilier de la pire façon.

Vers 1540 le poète soufi Malik Muhammad Jayasi raconte, dans une œuvre épique, l’attitude héroïque de Padmavati, préférant s’immoler plutôt que de se soumettre au meurtrier de son époux. Les exemples historiques de suicides collectifs permettant d’échapper aux conquérants tyranniques sont nombreux. Pour les régions du Rajasthan, la reine Padmavati rehausse la gloire et la pureté des aristocrates rajpoutes par son exemple. Elle est une figure honorée et respectée à tel point que des temples ont été élevés en son nom.

Cette puissante image ancrée dans l’inconscient collectif avait déjà inspiré à Sanjay Leela Bhansali la mise en scène de l’opéra Padmavati (voir mon interview de 2013) du compositeur Albert Roussel au théâtre du Châtelet à Paris. Dans son long métrage, il a engagé tout son génie et son expérience pour produire une œuvre très sophistiquée. La différence avec son ballet parisien est le contexte actuel ultra politisé et nationaliste en Inde. Des politiciens non-scrupuleux attisent des émotions et des rancœurs entre les communautés hindoues et musulmanes. De fausses rumeurs ont annoncé qu’il y aurait une scène de rêve dans le film, où la reine serait soumise a la concupiscence de l’horrible Khilji. En conséquence, Bhansali a été agressé, ses décors saccagés, sa tête mise à prix publiquement ainsi que celle de Deepika Padukone (si ! si ! vous lisez bien). Anurag Kashyap a demandé au gouvernement d’intervenir devant de telles menaces. La production a renoncé à la sortie en décembre 2017, pour la repousser à janvier 2018.

Malgré ces manifestations incontrôlées, le film devrait trouver son public car c’est une œuvre remarquable, visuellement très recherchée, interprétée brillamment. Le jeu de Ranveer Singh, en conquérant veule et pervers, est impressionnant. Toute la sauvagerie d’un être capable de profondes bassesses est représentée ici. Un de ses meilleurs rôles ! Deepika Padukone est magnifiée dans sa pureté parfaite dès la première image et affirme son personnage courageux au fil de l’intrigue.

Shahid Kapoor charme par son regard et la droiture de sa stature royale. Le film a cependant quelques longueurs qui rappellent certainement la notion du temps, différente, de cette période épique. Le souci des détails, des décors, des costumes, plonge le spectateur dans un univers révolu et inconnu pour de nombreux occidentaux, rien qu’en cela, c’est un spectacle de premier choix.

Est-ce que l’insistance du réalisateur à opposer les deux camps avec des décors et des lumières très contrastés ne réduit pas l’histoire en une démonstration de la noblesse rajpoute, sans plus ? Cette exagération sert-elle le scénario ou bien est-elle une concession en vue d’apaiser les âmes ? Saura-t-on si S.L. Bhansali a coupé ou réécrit des dialogues entre décembre et janvier ? Sûrement jamais. Les scènes de bataille sont tournées soit trop loin soit sans profondeur, ce qui perturbe après les combats épiques de Baahubali. L’esthétisme de S.L. Bhansali demeure son incontestable maestria et donne envie de revoir Padmaavati pour savourer la précision des détails .

Tous les cinémas de Bombay ont fait le pari d’une affluence maximale, ce qui réduit les séances disponibles pour les films américains et autres. Les réservations en 3D et dans les différentes langues vont bon train pour ce long week-end du Republic Day. Les perspectives de haute fréquentation des salles annoncent le succès du dernier opus de S.L. Bhansali.

Brigitte Leloire Kerackian, Bombay, janvier 2018.


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