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Well Done Abba

Traduction : Bien joué, papa / Le puits est fini, papa

Bande originale

Hum Toh Apni Bawdi Lenge
Meri Banno Hoshiyar
Pani Ko Taraste
Rahiman Ishq Ka Dhaga Re
Sandesa Sandesa
Jab Bhi Muh Kholta

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Fiche IMDB
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La critique de Fantastikindia

Par Madhurifan - le 13 juillet 2010

Note :
(6/10)

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Sans même parler de l’affiche, le jeu de mots du titre donne le ton d’entrée de jeu. Well Done Abba signifie à la fois "Bien joué, papa" et "Le puits est fini, papa". Au début on ne sait pas trop ce que vient faire un puits dans cette histoire mais je vous assure qu’on est bien dans une comédie familialo-puisatière.

Armaan Ali (Boman Irani) est le chauffeur d’un industriel de Mumbai. Ça ne va pas très fort pour lui car son patron est en train de le virer avec pertes et fracas car il est rentré de vacances avec plusieurs mois de retard. Armaan se défend comme il peut et profite d’un dernier voyage en voiture à Pune pour raconter ses aventures. Le film se passe pendant le voyage et consiste en une suite de flash-backs sur l’histoire farfelue d’Armaan.

En revenant dans son village natal près d’Hyderabad pour ses vacances, Armaan constate que l’absence de puits pose de gros problèmes au village en général et à sa fille, la jolie Muskaan (Minissha Lamba) en particulier. Heureusement, il apprend que le gouvernement donne de l’argent aux pauvres pour construire des puits. Mais pour cela il va devoir prouver qu’il est pauvre. C’est la première étape du parcours du combattant du pauvre Armaan qui verra presque tout son argent filer en pots-de-vin avant d’avoir pu creuser la première pelletée du son puits. Devant cette situation désespérée, Muskaan a une idée de génie : ils vont déclarer qu’on leur a volé leur puits ! Je ne vous en dis pas plus pour ne pas vous gâcher les péripéties de cette aventure rocambolesque.

Well Done Abba est une comédie qu’on pourrait mettre dans la catégorie des "films villageois". Il se situe dans la lignée des Welcome to Sajjanpur (mêmes réalisateur et scénariste) et Malamaal Weekly. C’est une vision un peu à la Astérix, avec loupe et personnages typiques du village. Tout tourne autour de cette petite communauté et des rapports entre ses membres. On trouve les ruelles baignées de soleil, la vie rurale et les histoires de voisinage qui prennent des proportions d’affaires d’Etat. Comme toujours dans ce genre de film, les seconds rôles foisonnent, des religieux aux magouilleurs, des hommes politiques vénaux à l’inévitable amoureux de l’héroïne. Bref, les lois du genre sont respectées. On est vraiment dans une épopée rurale.

Pour le scénario, Shyam Benegal et Ashok Mishra font fort. Peut-être un peu trop fort d’ailleurs. Imaginer qu’on a volé un puits, surtout lorsqu’il n’a pas été creusé, il fallait oser. On a quand même du mal à croire que tout le monde marche dans la combine sans sourciller. Mais une fois libérés de notre esprit cartésien, la porte est ouverte à toutes les fantaisies et tous les délires. L’intérêt de ce genre de film, en vase clos, est de mettre en jeu une société complète, à échelle réduite. Benegal dresse ainsi, sans avoir l’air d’y toucher, une liste détaillée de tous les travers de corruption et de soif de pouvoir qui posent tant de problèmes à la société indienne. Au-delà de la comédie pure qu’il revendique, le film a donc également un aspect politique et social.

Hélas, Benegal a un problème : le rythme. Le film semble soumis à des coups de pompe à répétition. On passe de moments d’intense jubilation et de détails très bien vus à des longueurs sans aucune énergie, poussives. Si, en tant que scénariste, il a d’indéniables qualités, en tant que réalisateur, avec Well Done Abba, il a plutôt raté son coup. C’est vraiment dommage car ce scénario est bien construit et ne manque pas de péripéties. Mais la technique, la façon de filmer sont atones. Comme si le réalisateur s’ennuyait. Autant la relative fluidité de Welcome to Sajjanpur faisait qu’on s’immergeait petit à petit dans le village, autant ici on reste à distance. Peut-être le fait d’enchaîner deux films assez semblables dans leur atmosphère n’était-il pas une excellente idée.

Heureusement, il y a les acteurs.

Boman Irani domine largement cette histoire dans laquelle il tient le rôle central. C’est d’ailleurs à noter car on le voit rarement tout en haut de l’affiche. Dans Well Done Abba, il interprète deux jumeaux et il se régale à incarner ces deux personnages. S’il est dans un registre assez classique pour lui dans le rôle d’Armaan (le chauffeur), il s’en donne à cœur joie avec Rehman, le frère jumeau. Il faut le voir en roux sournois et un peu demeuré marié à une espèce de folle tout aussi obsédée que lui par l’argent. L’occasion de quelques scènes burlesques qui font mouche. En prime, les trucages sont plutôt bons lors des face-à-face entre les deux Boman. C’est assez amusant d’ailleurs, car, autant ces effets spéciaux, relativement difficiles, sont parfaitement réussis, autant une simple incrustation sur fond bleu, lors des séquences en voiture, est totalement ratée. Paradoxes du cinéma indien…

Second premier rôle (si l’on peut dire), Minissha Lamba. Elle dégage une grosse énergie et tient sa place avec conviction et enthousiasme. Si elle s’en sort nettement mieux que dans le très oubliable Kidnap, on est quand même loin de Bachna Ae Haseeno dans lequel sa palette d’émotions était bien plus large. En tout cas, c’est une actrice à suivre de près.

Hormis Boman et Minissha, le film s’appuie sur d’excellents seconds rôles. Parmi eux, Sammir Dattani, l’amoureux de la belle Minissha prêt à tout pour l’aider et conquérir son père, est l’archétype de… l’amoureux prêt à tout pour conquérir son futur beau-père. Rajit Kapoor, le flic intègre doté d’une épouse acariâtre et qui fait ce qu’il peut avec fatalisme, est le seul du village à garder la tête froide et à défendre des valeurs d’honnêteté. Il en fallait bien un pour sauver l’honneur car le tableau de la société dépeint par Benegal n’est pas très flatteur ni optimiste. Mais le plus savoureux de la catégorie "seconds rôles" est peut-être le couple Ravi Kishan-Sonali Kulkarni, futurs jeunes mariés légèrement obsédés… mais contrariés dans leurs ébats. Il fait irrésistiblement penser au couple Sohail Khan-Isha Koppikar dans Salaam-e-Ishq. Au-delà de ce genre d’hommage… ou de plagiat, on sent bien que les complices Benegal et Mishra se sont fait plaisir en inventant des personnages pleins de défauts, à la limite de la caricature mais, au final, attachants. Une raison de plus de regretter le côté brouillon et peu passionnant de la réalisation sans lequel on aurait sans doute applaudi des deux mains.

Pour le reste, rien de bien extraordinaire. Une musique qui va bien et qui n’a d’autre ambition que d’accompagner le film, une photo et un montage sans imagination et qui se font oublier au profit de l’histoire.

A l’arrivée, Well Done Abba est un film agréable à regarder, malgré les faiblesses de sa réalisation. Son scénario, en partie construit sur l’exagération des personnages et des situations, et ses acteurs font passer un agréable moment. S’il est sorti au printemps 2010 et qu’il a la fraîcheur de cette saison, c’est plutôt un film d’été, un film à regarder avec l’apéro à portée de main, donc plutôt en DVD. Ce n’est pas lui qui vous fera gagner les jeux olympiques des zygomatiques mais il leur fera quand même faire un peu de fitness.

Well Done Shyam !


Note : 6/10 - A voir. Bon film. On ne s’ennuie pas… sauf par moments.


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