Zindagi Na Milegi Dobara
Traduction : On ne vit pas deux fois
Langue | Hindi |
Genre | Road-movie |
Dir. Photo | Carlos Catalan |
Acteurs | Naseeruddin Shah, Hrithik Roshan, Katrina Kaif, Abhay Deol, Farhan Akhtar, Kalki Koechlin |
Dir. Musical | Shankar-Ehsaan-Loy |
Parolier | Javed Akhtar |
Chanteurs | Mohit Chauhan, Vishal Dadlani, Suraj Jagan, Shankar Mahadevan, Dominique Cerejo, Loy Mendonsa, Ehsaan Noorani, Clinton Cerejo, Alyssa Mendonsa, Joi Barua, Gulraj Singh, Farhan Akhtar, Hrithik Roshan, Abhay Deol, Maria del Mar Fernández |
Producteurs | Farhan Akhtar, Ritesh Sidhwani |
Durée | 154 mn |
Kabir (Abhay Deol), jeune Indien de Delhi d’un milieu assez aisé, vient de s’engager avec Natasha (Kalki Koechlin), bonne fille de famille riche. Tout semble donc pour le mieux et pour célébrer l’enterrement de sa vie de garçon, Kabir invite ses amis d’enfance Imran (Farhan Akhtar), facétieux publicitaire et poète à ses heures, et Arjun (Hrithik Roshan), trader stressé habitant à Londres, non pas à une fête, mais à un voyage à travers l’Espagne où les trois amis s’essaieront à un sport extrême choisi par l’un d’eux. Première destination : Barcelone. Après un tour (très) rapide de la ville et la location d’une voiture, notre trio se rend sur la Costa Brava. Sur le chemin, les différences de caractères des uns et des autres, ainsi que de vieilles rancunes ne manquent pas de faire surface, mettant en péril la suite du voyage. À Blanes, sur la Costa Brava, nos trois compères suivent un stage de plongée, au grand dam d’Arjun qui ne sait pas nager et a peur de l’eau. Il faudra toute la patience de la belle instructrice, Laila, une Indo-Américaine (que c’est curieux !) pour arriver à faire surmonter ses phobies à Arjun et profiter d’un beau baptême de plongée. La belle Laila fait des miracles : non seulement elle l’a aidé à vaincre ses peurs, mais elle convainc aussi le trio de la suivre à la Tomatina de Buñol, une petite ville de la côte de Valencia où les habitants, une fois l’an, célèbrent un holi particulier : au lieu de se lancer de la poudre de différentes couleurs, ils se lancent des tomates mûres. Notre petite troupe s’amuse grandement à Buñol jusqu’au moment où, Natasha, prise de doutes sur la fidélité de Kabir, débarque sans préavis. La troupe agrandie part ensuite pour Séville, lieu où se pratiquera le sport extrême choisi par Arjun : le parachutisme. Cette fois, c’est au tour d’Imran d’être confronté à ses peurs et l’instructeur est loin d’être aussi joli que Laila. Finalement tout se passe bien et la troupe (au passage, Natasha a été mise dans le premier avion en partance pour Londres) finit par assister à une fête populaire dans un petit village andalou. Après avoir dansé, bu un peu trop, fait un passage par le commissariat du coin, nos compères se retrouvent à Pampelune pour pratiquer le sport, un peu particulier, choisi par Imran pour le plus grand effroi des deux autres…
Zindagi Na Milegi Dobara, deuxième film de Zoya Akhtar, sœur de Farhan et fille de Javed, a été un gros succès de l’été 2011 au box-office indien. Reprenant les codes du road movie et du voyage initiatique, Zoya Akhtar corrige, avec Zindagi Na Milegi Dobara, les défauts de rythme, de cohérence dans l’écriture des personnages qui avaient valu à son premier opus, Luck by Chance, un succès et des critiques très mitigés.
En effet, ces trois personnages masculins sont bien sympathiques. On rit aux facéties d’Imran, mais on compatit aussi à sa quête secrète (connaître son père biologique et les raisons de son abandon). On a envie de secouer Arjun et de lui dire qu’il n’y a pas que le travail et l’argent dans la vie, qu’il faut, de temps en temps, lever le pied et profiter de l’instant présent. Quant à Kabir, même s’il semble être le plus raisonnable de la bande, on ne manque pas de se demander pourquoi il ne sait pas dire non, surtout à sa promise. Du coup, on a aussi envie de le secouer pour l’aider à prendre, quand il le faut, le taureau par les cornes. D’ailleurs, ses amis ne manqueront pas de le lui dire et c’est littéralement face aux taureaux qu’il prendra enfin son courage à deux mains quant à sa décision d’engagement. C’est un plaisir de suivre l’évolution de ces trois compères, de voir comment ce voyage, qui les mène au bout d’eux-mêmes, va les transformer, les faire mûrir.
En ce qui concerne les personnages féminins, le bilan est moins positif. Excepté Laila qui est audacieuse, sait faire preuve d’initiative et va jusqu’au bout de sa démarche, aussi bien dans ses choix de vie qu’en amour, les deux autres n’ont pas le beau rôle. Natasha apparaît comme une jeune fille gâtée, qui n’imagine pas qu’on puisse lui dire non et qui est bien possessive dans sa relation avec Kabir. Quant à Nuria, l’amie de Laila et aventure d’un soir d’Imran, elle est quasiment transparente.
La photographie met bien en valeur les paysages des différentes régions d’Espagne que traversent nos personnages au cours de leur périple, donnant au film un petit côté de dépliant touristique, certainement voulu par l’un des partenaires de la production, Turespaña, l’agence officielle du tourisme espagnol, qui compte bien, avec ce partenariat, voir augmenter le nombre de touristes indiens.
La musique accompagne bien le film, mais ne laisse pas un souvenir impérissable, en tout cas, pour mes oreilles. En revanche, les quelques poèmes que le personnage d’Imran récite en voix off et qui ont été écrits par Javed Akhtar sont nettement plus intéressants et mettent bien en valeur de très belles scènes.
Quant au fameux titre Señorita, gros succès indien de l’été, ce n’est ni plus ni moins que "una canción del verano", un tube de l’été, avec son côté accrocheur, la seule originalité étant de faire chanter, avec la voix principale, les trois acteurs. Un détail, certes sans trop d’importance, me chagrine malgré tout. Avec le nombre de jolies filles ou de belles femmes qu’il y a en Andalousie, on se demande pourquoi la réalisatrice (ou le chorégraphe, ou le producteur ?) a choisi une femme ayant dépassé la quarantaine (cela se voit) pour incarner cette "señorita", terme espagnol qui signifie mademoiselle et peut avoir une connotation péjorative s’il s’applique à une femme d’âge mûr et que tout le monde connaît même sans maîtriser la langue de Cervantès. C’est d’ailleurs le mot espagnol qui revient le plus souvent dans le cinéma indien du Nord au Sud, murmuré par Shah Rukh Khan-Raj à Kajol-Simran dans Dilwale Dulhania Le Jayenge ou chanté par Krishna -Surya à Janaki-Jyothika dans Poovellam Kettupaar, entre autres.
Cette faute de goût sur le casting de la "señorita" n’est pas le seul détail choquant du film, en particulier lorsqu’on connaît un peu l’Espagne et ses fêtes. En effet, les courses de taureaux dans les rues de Pampelune ont lieu à la Saint Firmin, la San Fermín en espagnol, saint patron de la ville auquel les coureurs demandent protection avant le lâcher des taureaux. Cet événement culturel a donc lieu début juillet (la San Fermín tombe le 7 juillet dans le calendrier espagnol). Or, dans le film de Zoya Akhtar, nos protagonistes participent aux courses de taureaux à la fin de leur voyage, après avoir assisté à la Tomatina de Buñol, laquelle a lieu à la fin août. Mais c’est là tout le charme du cinéma hindi qui inverse le temps, réduit les distances ou fait rouler les voitures sur la mer (rappelez-vous de Chalte, Chalte, où Shah Rukh Khan réussissait la prouesse d’aller en voiture de l’île de Mykonos à Athènes).
Finalement, Zindagi Na Milegi Dobara est un film très agréable qui permet de passer une bonne soirée et qui montre, à l’instar de Delhi Belly, mais de façon beaucoup plus subtile, une certaine modernité ; en particulier dans le propos principal : on ne vit qu’une fois, donc il est important de profiter de l’instant présent en se libérant des pressions familiales (on n’est pas obligé de se marier à tout prix pour faire plaisir à ses parents), professionnelles (l’argent n’est pas la seule chose importante dans la vie) ou sociales (on peut prendre l’initiative lorsqu’on est une femme).
Les personnages principaux sont tout de même des Indiens issus de la classe aisée comme le note Didi, donc le bachelor trip est totalement dans leur culture et dans leurs moyens, l’un vit à Londres, les deux autres sont architectes et publicitaires, rien d’incroyable là dedans. L’influence occidentale est indéniable dans la vie indienne en dehors des classes les plus défavorisées. C’est un film contemporain qui comme ses petits frères s’adressent au public des multiplexes, donc urbains et plutôt aisés.
Concernant le film, ZNMB est un très très bon cru 2011. Comme l’a précisé Didi également, quelle belle évolution depuis Luck by Chance qui avait un goût d’inachevé, alors que celui-ci est parfaitement maîtrisé, tant dans le propos, que dans le scénario et la réalisation. Les trois acteurs sont excellents, tout en retenue et fort convaincants. Le personnage de Kalki est détestable à souhait mais très bien écrit et quelle surprise pour moi d’avoir trouvé Katrina Kaif convaincante dans ce rôle. Elle représente le fantasme de ces trois garçons, tout en étant vive, intelligente et indépendante.
Cela faisait longtemps que je n’avais pas vu Hrithik Roshan avec cette étincelle dans le regard, qui prouve que bien dirigé, c’est un bon acteur. Farhan Akhtar est très bon dans certaines scènes, un peu plus effacé dans d’autres et Abhay Deol confirme son talent.
Pour moi, ce film amène la même fraîcheur que Dil Chahta Hai lorsqu’il était sorti à l’époque, en faisant un cinéma indien certes dans le fond mais tout à fait accessible à d’autres cultures.