]]>

Laaga Chunari Mein Daag

Traduction : Mon voile est tâché

Bande originale

Hum To Aise Hain
Zara Gungunalein Chalo
Chunari Mein Daag
Ik Teekhi Teekhi Si Ladki
Ehi Thaiyaa Motiya
Kachchi Kaliyaan

En savoir plus

Fiche IMDB
Page Wikipedia
La critique de Fantastikindia

Par Lalita - le 26 décembre 2007

Note :
(6.5/10)

Article lu 9551 fois

Galerie

Dernier film de Pradeep Sarkar (réalisateur de Parineeta), LCMD aborde le sujet épineux de la prostitution à travers le destin d’une jeune fille de la classe moyenne.

Cette classe moyenne fait ici l’objet d’une critique acerbe. Le père à la retraite et malade (Anupam Kher) se plaint de ne pas avoir de fils pour s’occuper du foyer, alors que lui-même se décharge de ses responsabilités sur les épaules de sa femme (Jaya Bachchan). Se sentant coupable, Vibha (Rani Mukherjee) décide qu’il est de son devoir en tant qu’aînée d’aider la famille à survivre. Elle quitte la maison et la petite ville de Bénarès pour Mumbai afin de trouver du travail. Mais sans diplôme et sachant à peine parler anglais, sa tâche se révèle ardue. Très vite se profile l’ombre d’une vie sur le pavé.

Pourtant Pradeep Sarkar prend le parti étonnant de nous montrer qu’elle a le choix. Vibha aurait pu se contenter de petits boulots qui ne nécessitent aucune qualification particulière malgré des débuts difficiles. Dans son histoire il n’y a pas de situation d’esclavage moderne, juste une jeune fille face à "son choix". Car certes, celui-ci est d’abord motivé par la précarité. Mais il l’est aussi par le défi lancé avant son départ d’être le "fils absent". Et disons-le : si Vibha n’avait pas réussi tout de suite à la ville, elle aurait été constamment mise en situation d’échec car toujours comparée par son père à son rival fantôme. C’est ainsi que tout discours bien-pensant est balayé. Celui qui le tient est un homme, alors que toutes les femmes à qui elle demande conseil lui disent que nécessité fait loi. Point de vue nouveau sur le plus vieux métier du monde dans l’Inde contemporaine, ou discours dépassé et régressif sur un sujet abordé des centaines de fois au cinéma (comme le disent la plupart des critiques indiens, qui ont cloué le film au pilori) ?

Toujours est-il que jusque-là le film intéresse et fonctionne. Jusqu’à ce que Vibha, sous-qualifiée en tout, ne devienne "pute de luxe" pour riches hommes d’affaires esseulés. La petite provinciale se métamorphose alors en femme fatale bilingue et raffinée. Des efforts qui – peut-on penser – auraient pu être faits pour la recherche d’un emploi "convenable". C’est le seul moyen pour elle d’intégrer l’Inde qui brille et de rencontrer l’homme de sa vie (Abhishek Bachchan dans une énième apparition dispensable). Les révélations se font ensuite sans colère, ni ressentiment… mais avec de la tristesse, des pleurs et du pathos à n’en plus finir. La fin extrêmement prévisible (et surtout très conservatrice) annihile presque les bonnes prestations de Rani Mukherjee, Konkona Sen Sharma (qui interprète sa soeur cadette), et Jaya Bachchan.

Il faut dire que le scénario du film a été modifié suite au flop de Jhoom Barabar Jhoom (impossible de savoir à quel point) afin de ne pas choquer le public familial. LCMD est le film semi-commercial qu’essaie de sortir chaque année la maison Yash Raj. Elle l’a fait en 2006 avec Kabul Express et a reçu les accolades des critiques pour cette prise de risque. Or une année 2007 en demi-teinte l’a forcée à revoir sa stratégie.

On regrette donc que le réalisateur ait tout fait pour aborder son sujet de biais : en ne parlant jamais de sexualité par exemple. Mais il reste subversif dans son propos en ne faisant pas de Vibha une simple fille de joie sur le trottoir, mais en égratignant la sacro-sainte image de la bonne fille de la classe moyenne. Il le justifie par le fait que dès le départ Vibha est fascinée par une courtisane de Bénarès (Hema Malini dans un caméo), sorte d’Umrao Jaan moderne toujours parée de vêtements luxueux. Cependant, on ne peut s’empêcher de penser que son statut a aussi été déterminé par le glamour standard exigé dans chacune des productions Yash Raj Films.

Résultat : LCMD souffre de l’image pesante d’une maison de production spécialisée dans la comédie familiale qui cherche à aborder des thèmes osés sans prendre de risque, juste pour donner l’impression de le faire. Il faut toujours revoir nos attentes. Avec Fanaa, ne vous attendez pas à un point de vue politique sur la situation au Cachemire. Avec Kabul Express, n’attendez pas plus de détails sur la situation en Afghanistan en dehors de : « la guerre c’est mal, le taliban est méchant ». Avec Ta Ra Rum Pum, la pauvreté n’a jamais été aussi sexy. Alors dans LCMD, ne vous attendez pas à un monologue de dix minutes sur ce qu’on ressent quand on demande de l’argent en échange de sa virginité. Ce n’est jamais le but de toutes ces productions qui suivent scrupuleusement la philosophie de Yash Chopra : le cinéma n’est que pur divertissement.

Pour finir, on ne s’étonnera pas de la photographie impeccable du film pour une production Yash Raj. La bande son est entraînante sans convaincre. La sympathique chanson Hum To Aise Hain a le mérite de mettre du baume au cœur, alors que les autres méritent à peine une mention assez bien.

Malgré de gros défauts, Laaga Chunari Mein Daag reste un mélo moyen mais regardable pour une soirée DVD entre amis. Rien de plus, rien de moins.

Commentaires
14 commentaires
En réponse à Laurent - le 01/01/2008 à 22:09

D’accord avec toi et avec ta note ! cela reste un film agréable et soigné tout à fait distrayant, meilleur que l’ennuyeux Aaja ou l’agaçant JBJ.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Amalia S. le 28/11/2021 à 20:26

Je trouve que ce film , très bien interprété ( surtout par Rani Mukerji) est bien construit et très humain ( cf. sa jolie fin).
Les chansons m’ont semblé tres originales.
On ne s’ennuie pas, du début à la fin.
Bref, j’aime beaucoup ce film

BoLlY cRaZy le 12/12/2009 à 17:54

Je n’avais pas de grandes attentes concernant ce film (les critiques et le public indien ne l’avaient pas du tout apprécié), donc je ne pouvais pas être déçue. Comme prévu, je ne l’ai pas été ; au contraire, j’ai même était surprise. OK, on n’a pas là un chef d’oeuvre du genre ou un film dur et poignant de réalisme, ça reste en fait un pur masala bollywoodien où tout ce termine bien malgré la gravité du sujet abordé. C’est un film qui se regarde vraiment facilement. Le seul truc qui pose problème (et à mon avis c’est LA raison pour laquelle le film n’a pas eu de succès), c’est qu’on ne comprend pas le choix fatidique de Rani : elle aurait pû éviter de devenir une prostituée, elle avait le choix, mais je pense que le réalisateur voulait tellement parler de la prostitution, qu’il ne s’est pas trop soucié de la façon dont il a amené le sujet dans l’histoire… Je lui mettrais 5,5 ou 6.

BoLlY cRaZy le 12/12/2009 à 17:50

Je n’avais pas de grandes attentes concernant ce film (les critiques et le public indien ne l’avaient pas du tout apprécié), donc je ne pouvais pas être déçue. Comme prévu, je ne l’ai pas été ; au contraire, j’ai même était surprise. OK, on n’a pas là un chef d’oeuvre du genre ou un film dur et poignant de réalisme, ça reste en fait un pur masala bollywoodien où tout ce termine bien malgré la gravité du sujet abordé. C’est un film qui se regarde vraiment facilement. Le seul truc qui pose problème (et à mon avis c’est LA raison pour laquelle le film n’a pas eu de succès), c’est qu’on ne comprend pas le choix fatidique de Rani : elle aurait pû éviter de devenir une prostituée, elle avait le choix, mais je pense que le réalisateur voulait absolument parler de la prostitution, donc il ne s’est pas trop soucié de la façon dont il a amené le sujet dans l’histoire…
Je lui mettrais 5,5 ou 6.

pbx67 le 12/05/2009 à 23:12

Avec Aditya Chopra, producteur, en arrière-plan, il ne faut s’étonner de rien…

Celui qui regarde LCMD avec un esprit ouvert sera frappé par les nombreuses analogies avec La Flûte enchantée, opéra initiatique de Mozart qui nous entraîne dans les arcanes de la Franc Maçonnerie.

L’Inde n’étant pas Vienne au 18e siècle, les rôles masculins et féminins sont ici inversés, et Batki-Pamina est issue de Bénarès, ville sainte de l’hindouisme, l’un des lieux les plus sacrés des hindous, la Kashi des anciens. Ce ne sera pas dans les 3 temples de la Sagesse, de la Raison et de la Nature qu’elle sera initiée, mais uniquement dans celui des Épreuves. Et avant de pénétrer dans le temple de la Lumière, but du parcours initiatique, elle surmontera l’épreuve du Feu, qui est le sacrifice de soi, le don de sa vie pour le bien d’autrui, en l’occurrence sa famille.

Les souffrances lui feront par ailleurs découvrir une nouvelle dimension de son être, cf la chanson titre : "I’m a dream, An apparition, My own shadow I fear, Like a damp twig, I burn, I sear, I am illusion. I am shade, I am flesh, I am soul, I am still, I am mute, I am resolved."

Chutki-Papagena représente l’humanité ordinaire, celle qui vit sans se poser de questions. Voir les Wikipedia français et anglais pour plus de détails.

Maya le 10/04/2009 à 13:51

D’accord avec toi Madhurifan, j’aurais mis aussi une note plus élevée. Je trouve que les actrices sont excellentes, autant Konkona (ah la scène sur les escaliers !), que Jaya (au téléphone…) et Rani, avec son étonnante transformation au fil du film, ce rôle méritait un Filmfare award.

Et puis ce film échappe au manichéen, mais bien l’accent sur la facilité de certains dérapages, non dits, hypocrisies… Les seconds rôles sont des médiateurs très efficaces, on échappe au rôle du vilain proxénète, et à pas mal de clichés (dont la vulgarité).

Certes la fin est un peu trop "happily ever after" et on n’y croit pas vraiment mais en même temps, "ouf, on est bien dans le monde délicieux de Bollywood".

Madhurifan le 10/04/2009 à 14:18

J’avais posté mon message un peu vite et j’ai donc oublié de parler de cette fin qui tombe comme une cheveu sur la soupe. Mais tu as parfaitement résumé : "on est dans le monde délicieux de Bollywood". délicieux et tellement réconfortant. Youpiii !!!

Madhurifan le 10/04/2009 à 10:13

Merci pour cette chronique Lalita.

Personnellement, je trouve que ce film mérite un peu mieux que le 6.5. Clairement, on n’est pas dans le chef d’oeuvre mais je trouve que les caractères des personnages sont plutôt bien travaillés. Celui qui m’a le plus marqué est le personnage de Jaya Bachchan. La scène de bascule du film, au téléphone, lorsqu’elle pousse littéralement Rani du côté sombre ;-) me semble remarquable. Mais Anupam est aussi très convainquant.
Ce qui me plait également dans ce film (outre l’escalier mystère : http://forum.fantastikindia.fr/site/index.php?topic=1965.15 :-) c’est le traitement de l’éloignement familial. Bien sur, on reste dans uns structure classique Bollywood mais le déracinement et ses ravages me semble bien mis en valeur. Je pense d’ailleurs que le manque de succès du film tient en partie au fait qu’il appuie là où ça fait mal.
Pour finir, j’ai adoré le générique sur la Gange à Varanasi et les photos de la ville. Ca m’a donné envie d’y retourner. pfff…..

Leela le 02/06/2008 à 23:41

je suis sur que le film à été modifié à la dernière minute, c’est pas possible d’avoir un sujet comme sa, avec Rani et Abhishek. C’est criminel d’avoir gaché ce film.
Mais Rani est toujours aussi bien, vraiment bonne actrice.
Le couple Rani/Abhishek n’est pas aussi touchant que Yuva, Bunty Aur Babli ou même Hum Tum.
Mais comme Aaja Nachle, le personnage centrale est une femme et c’est déjà un excelent point pour moi.

Lafrarie le 13/01/2008 à 07:11

décue par le film en général, le scénar en particulier, les bons points néammoins, la photo et l’interprétation des filles

anonyme le 03/01/2008 à 19:07

En fait je m’attendais à pire quand j’ai vu le film.
Mais la photographie soignée, l’interprétation irréprochable et la parfaite mise en scène m’ont permis de passer un bon moment.
Cependant je pense que le point faible du film réside sur les chansons qui sont pour la plupart pas terrible et sur un happy end digne de cendrillon.
C’est dommage car la descente aux enfers d’une jeune provinciale dans la prostitution de luxe était une idée tout à fait interéssante et plutôt bien abordée au début du film et assez bien développée par la suite.
Le seul hic c’est la fin qui bien que jolie est trop naïve.
Enfin bon. Ce n’est que mon avis.

Laurent le 01/01/2008 à 22:09

D’accord avec toi et avec ta note ! cela reste un film agréable et soigné tout à fait distrayant, meilleur que l’ennuyeux Aaja ou l’agaçant JBJ.

jawad le 27/12/2007 à 11:28

Heu… moi je suis guère rassuré en voyant la conclusion de l’article…

anonyme le 27/12/2007 à 23:40

hihi je pensais pourtant tempérer mon avis grâce à cette phrase.

En fait, LCMD est un film qu’on peut aimer. C’est un vraiment un mélo standard comme le fait Yashraj depuis toujours. Sauf que ça fait plusieurs films où la célèbre maison de prod essaie d’aborder des thèmes dramatiques en faisant de la demi-mesure pour conserver son image proprette et ça agace. Ou on met les mains dans le caca une fois pour toute ou on s’abstient et on fait comme le producteur de Vivah. Tout le monde croyait qu’il était cramé et que son film était trop ringard pour l’ère des multiplexes mais ça a bien marché…

(tiens ça donne une idée d’article, Yashraj en pleine crise d’identité hum…)

gogo le 27/12/2007 à 08:32

Ah tiens, je m’attendais à un vrai navet, ta critique me rassure (un peu >_<)…