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Ek Vivaah… Aisa Bhi

Traduction : C'est encore un mariage

LangueHindi
GenreMélodrame / Romance
Dir. PhotoHarish Joshi
ActeursIsha Koppikar, Alok Nath, Sonu Sood, Smita Jaykar, Vishal Malhotra, Amrita Prakash
Dir. MusicalRavindra Jain
ParolierRavindra Jain
ChanteursShreya Ghoshal, Suresh Wadkar, Shaan, Pamela Jain, Farid Sabri, Satish Dehra
ProducteursAjit Kumar Barjatya, Kamal Kumar Barjatya
Durée127 mn

Bande originale

Mujhme Zinda Hai Woh
Mujhme Zinda Hai Woh (Part II)
Dekhe Akele Humne Solah Mele
Mandir Hai Ghar Ye Hamara
Dono Nibhayein Apna Dharam
Banna Banni
Kya Soch Ke Aaye The
Lo Ji Hum Aa Gaye
Jhirmir Jhirmir Meha Barse
Jhirmir Jhirmir Meha Barse (Part II)
Sang Sang Rahenge Janam Janam
Neend Mein Hai

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La critique de Fantastikindia

Par Madhurifan - le 10 février 2009

Note :
(8.5/10)

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Ce qu’il y a de formidable avec Ek Vivaah… aisa bhi, c’est qu’il vous permet de gagner du temps. Car, si vous n’avez pas aimé Vivah, circulez, y’a rien à voir. Voilà. Vous venez de gagner 2 heures. Mieux que le Loto.
Est-ce à dire que si vous avez aimé Vivah, vous aimerez Ek Vivaah… aisa bhi ? C’est une autre histoire.
Justement, en parlant d’histoire… Chandni (Isha Koppikar) vit avec son père (Alok Nath), son petit frère et sa petite sœur. Ils ne sont pas spécialement riches (middle class) mais le père est méritant. Il élève seul et avec abnégation ses trois enfants depuis la mort de leur mère. Chandni a une passion : le chant classique.
Prem (Sonu Sood) est plein aux as. Sa famille possède une entreprise et sa mère aimerait qu’il en prenne la direction. Mais lui veut faire de la musique (heureusement d’ailleurs, sinon, il n’y aurait pas de film).
Lors d’un concours de chant et de musique, ils se rencontrent (que c’est beau le hasard !). C’est le coup de foudre. Enfin surtout pour lui, car pour elle, c’est coup de foudre qui prend son temps.
Ils décident de se marier.
La veille du mariage, le père de Chandni meurt. Plus question de mariage car elle décide de reprendre le flambeau et de ne se marier que lorsque son frère et sa sœur le seront eux-mêmes. Pour vivre, elle ouvre une école de chant.
L’attente de Chandni et Prem va durer 12 ans.
Comme vous pouvez le constater, une histoire d’une complexité sidérante.

Et pourtant, Ek Vivaah… aisa bhi est un film envoûtant… à condition qu’on soit sensible à ce style si caractéristique du clan Barjatya : musique omniprésente, personnages sirupeux gavés de bons sentiments, regards par en dessous, sourires timides ou complices, gros plans langoureux, émotions et événements tragiques. Bref, du gulab jamoun cinématographique servant de rehausseur de goût à une histoire on ne peut plus linéaire et plutôt banale. Une recette éprouvée depuis longtemps avec comme figure emblématique le super blockbuster Hum Aapke Hain Kaun (4° meilleur score de tous les temps au box-office indien).
A chaque film des productions Rajshri, resurgit le même sujet de controverse : la vision proposée de la société indienne. Invariablement, cette vision en énerve certains. Et ce n’est pas ce film qui va arranger les choses. Ici, pas de dérapage, pas de transgression. L’homme a des devoirs, la femme a des devoirs. Ils les accomplissent quel qu’en soit le prix. C’est ainsi que Chandni va élever son frère et sa sœur et consacrer sans hésiter 12 ans de sa vie pour cela. Et ce n’est pas réellement un sacrifice à ses yeux puisque c’est son devoir. On ne peut pas faire trame plus classique. C’est le fond de commerce du clan Barjatya : les valeurs éternelles de l’Inde et le respect des règles et des devoirs. L’Inde moderne et l’influence de l’Occident n’apparaissent que dans les belles voitures, les appartements de luxe et les domestiques, jamais dans une quelconque rupture avec les valeurs traditionnelles.

Ek Vivaah… aisa bhi est un film indien et le réalisateur met le paquet pour que ce soit bien clair. Cette indianité ne se trouve pas seulement dans les comportements. On la trouve partout dans le film. Un seul exemple. L’action se situe à Bhopal, ville symbolique à plus d’un titre. D’abord, c’est géographiquement le centre de l’Inde, au croisement de la plus grande largeur et de la plus grande hauteur du losange indien. C’est ensuite une ville représentative de la cohabitation des deux grands courant indiens puisque peuplée d’hindous, elle a longtemps été dirigée par des musulmans. Mais c’est surtout une ville martyre depuis l’explosion de l’usine d’Union Carbide, la plus grande catastrophe industrielle à ce jour. Une ville où le mot « progrès » est associé à 30.000 morts (le dixième de la population de l’époque) et une quantité innombrable de contaminés. Donc une ville à fort pouvoir évocateur dans l’inconscient indien. Le parfait piédestal pour valeurs traditionnelles.
Ek Vivaah… aisa bhi a le charme des histoires simples, racontées avec beaucoup de douceur. Même les scènes douloureuses ou dramatiques sont traitées délicatement. Pas de hurlements, pas de crêpage de chignon. C’est ainsi que, lorsque sa belle-fille va quitter la maison familiale, c’est Chandni qui poussera son frère à la suivre. Dans la dignité et les larmes retenues, parce que c’est sa femme et qu’il n’est pas concevable qu’un mariage soit brisé par une relation fraternelle.
Mais, même si l’on peut regarder Ek Vivaah… aisa bhi comme une oeuvre autonome, on est obligé de le replacer dans la perspective de Vivah. En effet, il est impossible de ne pas y penser car, dès les premières notes de musique et les premières images, on retrouve l’ambiance du film de Sooraj Barjatya sorti en 2006. On a même du mal à en croire ses yeux et ses oreilles. Copier à ce point, ça dénote un culot incroyable. Les minutes passent et le rêve continue : on nous refait Vivah. Mais là où Vivah mettait 2 heures à passer de la rencontre au mariage (raté), Ek Vivaah… aisa bhi en met une seule. Puis le père meurt. Le mariage est encore raté. Ouf ! Ek Vivaah… aisa bhi peut voler de ses propres ailes.
C’est donc logiquement la seconde moitié du film, racontant les 12 ans d’attente des amoureux, qui est la meilleure. Et pourtant, il ne se passe pas grand-chose d’inattendu pendant cette deuxième heure. Mais le temps passe sans qu’on s’en aperçoive. Faire du contenu avec un minimum d’action, c’est une des forces des productions Rajshri. C’est un peu la méthode des soap télévisés appliquée au cinéma et avec les moyens du cinéma. D’ailleurs le réalisateur vient de la télévision.

Les similitudes entre les deux films ne s’arrêtent pas à l’histoire. Le couple Isha Koppikar / Sonu Sood évoque irrésistiblement le couple Amrita Rao / Shahid Kapoor. Et ce n’est bien entendu pas un hasard. Kaushik Ghatak dont c’est la première réalisation mais qui doit être surveillé de près par Sooraj Barjatya, joue à fond sur les symboles et l’inconscient des spectateurs. Tout ce qui a déjà façonné le spectateur de Vivah est récupéré. Jusqu’à l’affiche. La simple comparaison entre les affiches de Vivah et d’Ek Vivaah… aisa bhi est explicite. On y voit uniquement les deux personnages principaux. Ils ont la même coiffure, le même sourire, le même regard vers le bas. Le point d’accroche est le même : la femme. Habillée en rouge dans l’un (alors que Shahid est en blanc sur fond blanc). Habillée en blanc dans l’autre (alors que Sonu est en bleu sur fond sombre). Seule différence, une composition verticale et dépouillée dans Vivah et une composition horizontale qui permet de donner une place à la ville (dans toute sa tradition) avec Ek Vivaah… aisa bhi.
Alors Isha ou Amrita, Sonu ou Shahid ? Je trouve qu’Isha est moins convaincante qu’Amrita. C’est probablement dû au fait qu’elle va jusqu’à reprendre le jeu et les mimiques d’Amrita. Le résultat est qu’en regardant Chandni, on voit Poonam. Mais si le jeu de la timidité colle parfaitement à l’apparence frêle d’Amrita, il passe moins bien avec Isha, du moins pendant la première partie, avant qu’elle ne prenne en main le destin de sa famille. Donc, finalement, un choix pas si mauvais que ça.
Par contre les personnages incarnés par Shahid et Sonu sont suffisamment différents pour qu’on ne les compare pas instinctivement. Sonu Sood (qui ressemble physiquement de plus en plus à Amitabh jeune) dégage une certaine maturité et une force qui n’étaient pas dans le registre de Shahid Kapoor, plus ou moins embarqué dans une aventure qu’il ne maîtrisait pas vraiment.
Dans Vivah, le couple était jeune et fragile. Dans Ek Vivaah… aisa bhi, il a grandi et mûri.

Parmi les rescapés de Vivah, on retrouve au générique Alok Nath, dans le rôle du père. Un rôle qui lui va comme un gant. Un costume qu’il rode depuis bien longtemps. Quand on cherche un père à Bollywood, soit on le veut psychorigide et on se paie Amitabh, soit on le veut complètement gaga et on prend Alok Nath. On retrouve également Amrita Prakash, qui reprend avec conviction le rôle de petite sœur… avec quelques années de plus. Parmi les nouveaux, il y a Vishal Malhotra, dont la carrière de second rôle semble décoller et qui a déjà quelques films à son actif (Ugly Aur Pagli, Kismat Konnection, Jannat, Salaam-E-Ishq, Dor).
Quant à l’équipe technique, comme on ne change pas une équipe qui gagne, on reprend là aussi les mêmes (photo, son, montage). Le résultat final est efficace, percutant mais sans originalité. On pourrait dire traditionnel.
En définitive, la seule chose importante qu’on ne retrouve pas dans ce nouveau film, c’est… l’escalier mystérieux… qui garde tout son mystère (voir la discussion sur le forum à ce sujet).

On ne peut bien entendu pas parler de Ek Vivaah… aisa bhi sans parler de la musique. Elle est omniprésente. Et même lorsqu’elle se tait, elle donne l’impression d’être là. Les productions Rajshri n’ont jamais été avares de musique. Ce film ne déroge pas à la règle. Pas moins de 12 chansons (ou versions) dans des genres divers mais avec une ambiance plutôt cohérente. Une fois qu’on a cette BO dans la tête, il est très difficile de s’en débarrasser. Ravindra Jain réussit à mettre dans chaque chanson le petit bloc de notes bien vicieux qui s’incruste et qui ne sort plus. On passe des douces mélodies (dont le splendide Mandir Hai Ghar Ye Hamara) aux musiques de mariage et de fête sans oublier les magnifiques duos de Shaan et de l’angélique Shreya Ghoshal. Tout cela crée une ambiance caractéristique et dans la parfaite continuité de Vivah. On peut d’ailleurs se demander si tout n’a pas été écrit au même moment puis réparti entre les deux films.
A la lecture de ce qui précède, doit-on en conclure qu’Ek Vivaah… aisa bhi n’est qu’un filon qu’on exploite ? Qu’une nouvelle version de la même histoire qu’on nous sert à nouveau ? N’y a-t-il donc aucune originalité dans ce film ?
Ek Vivaah… aisa bhi est original d’abord dans sa façon de fonctionner. Comme on l’a vu, Kaushik Ghatak s’appuie sur le socle créé par Vivah. De cette façon, pas de perte de temps à exposer la situation. La rencontre Isha/Sonu est caractéristique de cette démarche. Presque bâclée et sans grand entrain. Normal, ça n’intéresse pas le scénariste puisque ça a déjà été évoqué dans Vivah. Mais il fallait bien une rencontre, alors il y en a une.
On avait fait le reproche à Vivah d’être un panégyrique sans nuances de la tradition. Message bien reçu par Sooraj Barjatya, d’autant plus qu’il était incontestable.
Dans Ek Vivaah… aisa bhi, même s’il n’est pas question de toucher à la tradition, le tir est corrigé. C’est la femme qui ne veut pas du mari avant d’avoir élevé sa famille, c’est l’homme qui décide d’attendre qu’elle soit disponible. Elle travaille, gagne sa vie. Lui, papillonne en chanteur célèbre. On se croirait dans un film américain. Le message est clair : les traditions n’empêchent rien. Elles soudent la société mais n’empêchent pas les choix de vie. Mais surtout, l’amour permet tout, permet de résister à tout. Du pur jus 100% Bollywood en somme. Pour le coup, on peut se demander si l’autonomie affirmée de Chandni ne serait pas le début d’un virage des productions Rajshri ?

Avec Ek Vivaah… aisa bhi, inutile de chercher le cinéma d’auteur, les expériences extrêmes, la mise en scène innovatrice, le suspense, les effets spéciaux. En un mot, inutile de chercher des critères du cinéma occidental chez qui le Graal est bien souvent (mais heureusement pas toujours) l’originalité de façade. C’est un film indien, traditionnel et qui se revendique comme tel. C’est comme tout plat à saveur typée : on peut aimer ou pas. Si vous êtes sensible aux promenades en bateau dans la brise du soir en contemplant le coucher du soleil accompagné par les cris des oiseaux. Si vous croyez que l’amour est ce qui réunit les hommes. En fait, si vous êtes un(e) incurable romantique, alors vous craquerez pour Ek Vivaah… aisa bhi.

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