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Bollywood en chansons : 1980-1984

Publié jeudi 16 novembre 2017
Dernière modification lundi 11 septembre 2017
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Par Mel

Dossier Bollywood en chansons
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Khubsoorat


Année : 1980
Réalisation : Hrishikesh Mukherjee
Avec : Rekha, Ashok Kumar, Dina Pathak, Rakesh Roshan et David
Box Office : n°25, Semi Hit

Le film : À mi-chemin entre l’extravagance des grandes productions de Bollywood et le minimalisme parfois très noir du « parallel cinema », Hrishikesh Mukherjee a inventé le « middle cinema ». Il y dépeint une une classe moyenne plutôt aisée en s’intéressant principalement aux émotions simples. C’est exactement ce qu’il fait dans Khubsoorat (« Magnifique ») où il décrit la vie d’une famille bourgeoise écrasée sous le joug d’une mère particulièrement stricte.

La vie est triste dans la famille Gupta que dirige Nirmala (Dina Pathak) d’une main de fer. Les domestiques rampent. Son mari, l’adorable Dwarkaprasad (Ashok Kumar), n’a pas voix au chapitre. Les quatre garçons emmenés par Inder (Rakesh Roshan), le troisième fils médecin, rongent gentiment leur frein.
Un jour, un ami de la famille qui joue les entremetteurs organise le mariage de Chander, le second fils, avec Anju, la fille de Ramdayal (David), un veuf âgé. Manju (Rekha), la pétillante sœur d’Anju s’ennuie seule avec son vieux père et décide d’aller habiter chez les Gupta. Rapidement, Inder lève les yeux sur la nouvelle venue tellement vivante qui ne s’embarrasse pas de manières.
Nirmala ne se contente pas de diriger sa maison, elle participe aussi a des œuvres sociales et pour cela doit s’absenter souvent. Manju qui a réveillé peu à peu les passions des membres de la famille, organise sur la terrasse de petits spectacles lorsque Nirmala n’est pas là. Mais ce qui devait arriver arriva, elle revient à l’improviste pendant que Majnu chante une chanson qui la ridiculise…

Ce film sans prétention a été écrit en pensant à Rekha. Elle l’illumine de bout en bout et obtiendra d’ailleurs le Filmfare Award de la meilleure actrice pour sa performance. Le film quand à lui a obtenu celui du meilleur film. Gulzar en a écrit des dialogues souvent pétillants et qui font parfois référence à l’état d’urgence. Il est cependant difficile de qualifier Khubsoorat de film politique. C’est avant tout un charmant divertissement qui passe bien trop vite.

La chanson : Sare Niyam Tod Do de R.D. Burman et Gulzar
Après un petit spectacle de théâtre sur la terrasse de la maison, Manju entonne devant les hommes de la maison une chanson mettant en cause les règles strictes imposées par Nirmala. Comme pour rire, elle entonne Inquilab Zindabad (« Vive la révolution »), le fameux slogan du mouvement de l’Indépendance…

Sare Niyam Tod Do chantée par Asha Bhosle pour Rekha


Laawaris


Année : 1981
Réalisation : Prakash Mehra
Avec : Amitabh Bachchan, Amjad Khan, Ranjeet et Zeenat Aman
Box Office : n°4, Super Hit

Le film : Laawaris (« Orphelin ») est le quatrième film où Prakash Mehra dirige Amitabh Bachchan. Il avait créé pour lui le rôle du jeune homme en colère (l’angry young man) inauguré avec Zanjeer et il récidive ici dans un registre proche en faisant encore de Big B. (il mesure 1m88) un personnage révolté en quête de père. Presque toute sa carrière, Prakash Mehra s’est interrogé sur la filiation vue comme la seule voie pour atteindre la respectabilité et légitimer une place dans la société. Ici encore, le héros s’est retrouvé seul dès le plus jeune âge après avoir perdu tous ses liens familiaux.

Ranvir Singh (Amjad Khan) est un homme à femmes, célibataire et sans scrupules. Il n’est pas plus marié avec Vidya qu’avec ses nombreuses autres conquêtes. Lorsqu’elle lui apprend qu’elle est enceinte, il la rejette violemment. Elle meurt en mettant Heera au monde et pour éviter le déshonneur, le bébé est abandonné à un ivrogne. Ranvir croit son fils mort et dans un sursaut d’humanité, il se trouve taraudé par le remord.
Heera grandit sans famille dans le caniveau et devient un jeune homme (Amitabh Bachchan) fondamentalement bon mais profondément révolté qui enchaîne les petits boulots pour survivre. Un jour, il fait la connaissance de l’ignoble Mahinder Singh (Ranjeet) qui l’engage pour s’occuper à sa place de la propriété de son père au Cachemire.
Sans savoir qu’il est son père biologique, Heera se retrouve alors en présence de Ranvir Singh, devenu un riche propriétaire terrien qui tente de racheter sa faute. Le jeune homme, seul, pauvre et sans éducation, va devoir affronter les magouilles criminelles de Mahinder et les charmantes disputes avec la belle et riche Mohini (Zeenat Aman)…

Comme la plupart des films de cette époque, Laawaris est en réalité un one-man show du héros masculin. Amitabh Bachchan occupe l’écran à lui tout seul et les autres personnages ne sont que des faire-valoir. Ils sont heureusement tous formidables. Amjad Khan, déjà gravement malade, est aussi touchant qu’étonnant. Ranjeet est le parfait salaud qu’on adore détester. Zeenat Aman pourtant déjà à la fin de sa période de gloire parvient à tenir tête à un Amitabh Bachchan impérial.

La chanson : Mere Angne Mein de Kalyanji–Anandji et Anjaan
Madhu (Madhu Malini), la fille de Ranvir Singh, fête son anniversaire. Pour égayer l’événement, Heera interprète la chanson comique qui le hante depuis l’enfance. Il ne le sait pas, mais elle avait été crée par Vidya (Rakhee Gulzar) sa mère avant même sa naissance…

Bien que crédité par le duo Kalyanji–Anandji pour la musique et par Anjaan pour les paroles, ils ne sont pas les auteurs de cette chanson. Il s’agit en réalité d’un morceau folklorique très populaire d’Uttar Pradesh dont la source se perd dans la nuit des temps. Amitabh Bachchan raconte qu’elle était chantée pendant les mariages lorsqu’il était enfant et qu’il l’a même interprété sur scène bien avant 1981. On la retrouve d’ailleurs dans Bombay Talkie sorti en 1970 et dans Maje Le Lo présenté en 1975.

L’interprétation d’Amitabh Bachchan dans Laawaris est en revanche originale. Il chante pour la première fois une chanson entière à l’écran et ses travestissements, légèrement osés, ont fait rire tout le Sous-continent.

Mere Angene Mein interprété par Amitabh Bachchan


Namak Halaal

Année : 1982
Réalisation : Prakash Mehra
Avec : Amitabh Bachchan, Smita Patil, Shashi Kapoor et Parveen Babi
Box Office : n°4, Semi Hit

Le film : En reprenant les mêmes thèmes, Namak Halaal (« Serviteur fidèle ») est beaucoup plus léger que Laawaris sorti l’année précédente. Prakash Mehra nous montre encore un Amitabh Bachchan abandonné par ses parents, mais cette fois ce n’est pas le risque du déshonneur qui pousse à cette extrémité, c’est le sens du devoir d’un serviteur fidèle jusque dans la mort.

Seth Raja Singh, un homme très riche est très puissant a été sauvé de nombreuses fois par son garde du corps Bhim Singh. Dans l’hypothèse où il serait assassiné, il fait de Savitri (Waheeda Rehman), la femme de Bhim, son légataire universel. Au moment où elle va recevoir le testament, Girdhar Singh, le frère de Seth Raja, attaque la maison de Bhim et le tue ainsi que son patron. Dans un dernier souffle, le fidèle serviteur fait promettre à sa femme d’élever Rajkumar, le fils de Seth Raja, comme le sien, et de confier leur propre fils Arjun à son grand-père (Om Prakash) qui habite à la campagne.

Des années plus tard, Arjun (Amitabh Bachchan), part travailler à la ville. Il devient employé d’un grand hôtel, une des nombreuses propriétés de Rajkumar (Shashi Kapoor). Il est en fait géré par Savitri, mais Arjun ne sait pas qu’elle est sa mère tout comme il ignore ses relations avec Rajkumar. Tandis qu’il fait ses premières armes comme garçon d’étage, il tombe amoureux de Poonam (Smita Patil), la directrice de l’hôtel.
Naturellement, Girdhar Singh n’a pas cessé de vouloir massacrer la famille de Seth Raja et il complote sans arrêt pour faire assassiner Rajkumar. Arjun se retrouve alors à protéger Rajkumar comme son propre père protégeait autrefois Seth Raja…

L’histoire est aussi abracadabrante que trépidante. Un twist hasardeux permet même de faire apparaître Parveen Babi en tueuse à gage mâtinée de danseuse de cabaret. Mais c’est avant tout pour Amitabh Bachchan qu’on peut voir cette comédie masala. Il fait tout à la fois le clown, l’andouille, l’orphelin désespéré et le redresseur de tords pour le plus grand plaisir des spectateurs. Le duo qu’il reforme avec Shashi Kapoor fonctionne encore un peu, mais Shashi semble déjà vieilli. Comme toujours dans le cinéma de Prakash Mehra, les femmes sont des faire-valoir et il faut avouer que Smita Patil, Waheeda Rehman et Parveen Babi donnent le meilleur d’elles-mêmes dans leurs rôles insignifiants.

La chanson : Thodi Si Jo Pee Li Hai de Bappi Lahiri et Anjaan
Le jour de son anniversaire, Arjun fait une farce à son grand-père (Om Prakash) en montant un numéro d’ivrogne dépravé. Malheureusement pour lui, c’est le moment que choisit Poonam pour venir lui souhaiter sa fête…

Bappi Lahiri était déjà connu avant cette chanson et atteindra la gloire grâce à Disco Dancer, sorti neuf mois après Namak Halaal. En attendant, Thodi Si Jo Pee Li Hai est sur toutes les lèvres au début de 1982. Elle sera même reprise trente ans plus tard dans Department.

Thodi Si Jo Pee Li Hai chantée par Kishore Kumar pour Amitabh Bachchan


Betaab

Année : 1983
Réalisation : Rahul Rawail
Avec : Sunny Deol, Amrita Singh, Shammi Kapoor et Nirupa Roy
Box Office : n°2, Super Hit

Le film : Amitabh Bachchan règne sans partage sur le Bollywood du début des années 1980. Rishi Kapoor n’est déjà plus le jeune premier de Bobby, Jeetendra se ridiculise à chaque film et le débutant Sanjay Dutt se complaît dans les films d’actions qui se terminent dans le sang. Heureusement une nouvelle génération d’acteurs va arriver sur le devant de la scène et ce mouvement est inauguré par Sunny Deol avec Betaab (« Impatient »). La promotion du fils aîné de Dharmendra est l’archétype de ce qui se fera par la suite : le film est centré sur la future vedette et presque chaque plan est destiné à le mettre en valeur. Pour lui faciliter la tâche, il est opposée à une jeune première, ici Amrita Singh dont la grand-mère était la sœur aînée de Begum Para.

Betaab raconte l’histoire de deux enfants, Roma et Sunny qui étaient promis l’un à l’autre jusqu’à ce qu’un revert de fortune sépare les deux familles. Bien plus tard, la riche Roma (Amrita Singh), devenue une jeune femme a caractère très fort, passe des vacances à la campagne dans un des chateaux de son père, Sardar Dinesh Singh Girji (Shammi Kapoor). De son côté, Sunny (Sunny Deol) vit avec sa mère (Nirupa Roy) dans une modeste ferme isolée non loin de la propriété du Sardar. C’est un dresseur de chevaux reconnu dans toute la région et c’est à lui que l’on fait appel lorsqu’il s’agit de dresser un étalon sauvage prétendument indomptable.
Sunny tombe par hasard sur Roma alors qu’il avait amené sa mère à la gare. Il se souvient d’elle mais elle l’a oublié. Commence alors un jeu du chat et de la souris où Sunny amadoue Roma comme il le fait avec les chevaux. Cela devrait se terminer par un mariage mais le Sardar ne l’entend pas ainsi. Il ne peut supporter l’idée que sa fille fréquente un jeune homme pauvre, même s’il est le fils d’un ancien ami. Dans le même temps, un escroc nommé Balwant (Prem Chopra) complote pour que son complice qu’il fait passer pour son fils épouse Roma, comptant fermement sur la dot pour faire sa fortune…

Dharmendra avait inauguré les héros virils indiens au début des années 1960. Son fils est un beau jeune homme qui reprend haut la main le flambeau 20 ans plus tard. Sunny Deol réalise lui-même la plus grande partie des cascades, monte remarquablement à cheval et se bagarre comme un lion. De son côté, même si Amrita Singh n’a pas une beauté classique, elle fait preuve d’une grande énergie. À eux deux, ils forment un couple rebelle qui a su emporter l’adhésion du public. Ils reviendront ensemble à l’écran l’année suivante dans Sunny mais sans connaître le même succès.

La chanson : Jab Hum Jawan Honge de R.D. Burman et Anand Bakshi
La querelle entre Roma et Sunny a pris des proportions dantesques. Elle a détruit la ferme du jeune homme et par mesure de rétorsion, il la séquestre tant qu’elle n’a pas réparé les dégâts qu’elle a causés. Dans sa chambre, elle a retrouvé l’album qui contient de nombreuses photographies de leur enfance commune. Elle se souvient et réalise qu’ils s’étaient promis l’un à l’autre…

Le thème de cette célèbre chanson de R.D. Burman qui débute avec des accents de Tangerine Dream se retrouve tout au long du film. Sa mise en image est l’occasion d’entrapercevoir Sonu Nigam alors âgé de 10 ans.

Jab Hum Jawan Honge chantée par Lata Mangeshkar et Shabbir Kumar


Sharaabi

Année : 1984
Réalisation : Prakash Mehra
Avec : Amitabh Bachchan, Jaya Prada, Pran et Om Prakash
Box Office : n°2, Hit

Le film : Prakash Mehra explore une autre façon d’abandonner ses enfants dans Sharaabi (« Alcoolique ») sorti deux ans après Namak Halaal.

Amarnath Kapoor (Pran), le père de Vicky (Amitabh Bachchan) est un très riche industriel que se consacre entièrement à ses affaires au point de délaisser son fils. Depuis que sa mère est morte alors qu’il n’avait que quelques mois, le jeune homme n’a pu compter que sur Munshi (Om Prakash), un vieux serviteur. Il grandit donc sans père alors que celui-ci est physiquement présent dans le palais qu’ils habitent tous les deux entourés d’une nuée de domestiques.
De désespoir, Vicky a commencé à boire alors qu’il n’avait pas 12 ans. Avec le temps, il est devenu alcoolique et passe le plus clair de son temps ivre. Il titube mais il a le cœur sur la main, distribuant la fortune de son père au hasard de ses virées nocturnes. L’infâme Natwar (Ranjeet), un organisateur de spectacles de danse, repère la bonté de Vicky et cherche à en tirer profit. Il le convainc pour cela d’assister à une représentation en espérant que Meena (Jaya Prada), sa danseuse vedette, attirera son regard.
Il ne se trompe pas. Vicky offre à Meena une robe et un collier précieux en l’invitant à sa soirée d’anniversaire. Mais le jour venu, le collier a disparu, volé par Natwar…

Sharaabi est un film singulier où le héros passe le plus clair du temps à pleurer en titubant. Il évite cependant la lourdeur grâce à la présence de la ravissante Jaya Prada. Bien que toute petite, elle tient tête sans difficulté à Amitabh Bachchan qui de son côté, fait son numéro maintenant habituel de grand échalas désespéré. Elle a été nommé pour un Filmfare Award mais c’est Shabana Azmi qui a obtenu la précieuse statuette noire cette année là.

La chanson : Inteha Ho Gayi Intezaar Ki de Bappi Lahiri et Anjaan
Vicky fête son anniversaire. Ses employés, menés par Natthulal (Mukri), lui ont offert une bouteille de whisky géante et se sont tous laissé pousser la moustache en son honneur. Mais Meena n’est pas venue. Elle ne parvient pas à remettre la main sur la rivière de diamants que Vicky lui a donnée et n’ose pas se présenter devant lui. Il attend sans comprendre pourquoi elle n’est pas là. Et puis elle arrive enfin…

Les double chansons sont rares et il s’agit souvent comme Na Mangun Sona Chandi/Jhoot Bole Kauva Kate dans Bobby de deux morceaux proches. Ici, Bappi Lahiri fait le grand écart : la première partie est une charmante chanson jazzy semblant tout droit sortie des années 1950, tandis que la seconde ressemble à un ska que n’auraient pas renié les Specials au tout début des années 1980. Entre les deux, la liaison visuelle aussi bien que musicale laisse sans voix.
Tout au long de sa carrière Bappi Lahiri a plagié de nombreuses chansons occidentales au point d’en faire oublier son propre talent. Heureusement, l’extraordinaire Inteha Ho Gayi Intezaar Ki rappelle opportunément à quel point il a pu être important dans la musique de film des années 1980.

Inteha Ho Gayi Intezaar Ki chantée par Asha Bhosle et Kishore Kumar

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