]]>

Rajkumar Santoshi

Fonctions : réalisateur, scénariste
à : Madras (Tamil Nadu)
Nationalité : indienne
Famille : marié, 2 enfants

En savoir plus

Fiche IMDB
Page Wikipedia
La biographie de Fantastikindia

Par Laurent - le 14 juillet 2008

Dernière mise à jour le 26 août 2014

Article lu 1588 fois

Galerie

Contrairement aux nombreuses vedettes qu’il a dirigées depuis 1990, le réalisateur Rajkumar Santoshi est un personnage assez discret, et on ne sait que très peu de choses sur sa vie privée. Né vers 1958 (il avait 45 ans lors de la sortie de son célèbre film Khakee en janvier 2004), il est le fils du cinéaste P.L. Santoshi, qui fut surtout actif pendant l’âge d’or de Bollywood des années 50 et 60. Dans les années 80, il est l’assistant réalisateur de Govind Nihalani, connu notamment pour Ardh Satya, ou plus récemment son polar Dev.

Il débute sa carrière de réalisateur en 1990 avec un film d’action, genre qu’il reprendra et perfectionnera dans plusieurs de ses films avec des variantes ; comme pour la plupart de ses films suivants, il est aussi scénariste. Si Ghayal, film récompensé de plusieurs Filmfare Awards, a mal vieilli et apparaît maintenant au mieux comme une série B moyenne, le film est connu pour avoir définitivement lancé le bouillonnant Sunny Deol, poids lourd du cinéma d’action hindi, qui remplace Amitabh Bachchan dans le rôle typique de l’angry young man populaire, ennemi des injustices. Santoshi fait preuve dès ce coup d’essai d’une bonne direction d’acteurs, avec des seconds rôles (Om Puri, Kulbhushan Kharbanda) d’une finesse inhabituelle dans ce genre de film d’exploitation, ainsi qu’un méchant impitoyable interprété par l’intraitable Amrish Puri, qui donne une certaine saveur au film. Une autre particularité du réalisateur, c’est son refus du récit linéaire et son utilisation dès le début du flash-forward (Sunny emmené en prison pour un motif inconnu), qui précède le long flashback constituant le film : le déficit d’information sur les raisons pour lesquelles le héros est incarcéré crée ainsi un horizon d’attente chez le spectateur, une astuce de scénariste très moderne pour le Bollywood de l’époque.

Il utilise la même technique de mise en appétit en 93 au début de son film suivant, Damini, qui commence par la fin en nous présentant notre héroïne hagarde, interrogée dans un asile d’aliénés, avant de dérouler à rebours toute la spirale infernale qui l’y a menée. Œuvre plus ambitieuse, ce drame social féministe sur le viol d’une servante au sein d’une riche famille indienne est mémorable pour les joutes oratoires dans un tribunal entre Amrish Puri, encore une fois dans le rôle de l’antagoniste, et Sunny Deol, attachant dans un contre-emploi d’avocat alcoolique. Ce film assez démonstratif mais efficace est la première œuvre importante de Santoshi, qui y affirme déjà un certain goût pour le réalisme.

Tournant un film par an pendant cette période, il réalise en 94 son unique comédie, Andaz Apna Apna, un film relativement léger dans son genre à l’acronyme porte-bonheur (le triple A désignait jusqu’alors la comédie seventies Amar Akbar Anthony) réunissant Salman Khan et Aamir Khan. L’année suivante, il tourne Barsaat, film produit par Dharmendra pour lancer son fils Bobby Deol, comme il l’avait fait en produisant Ghayal pour lancer Sunny.

C’est justement avec le frère aîné des Deol, décidément son acteur préféré de cette décennie, que Santoshi réalise en 96 un autre film majeur, Ghatak. La vengeance de cet homme qui veut laver l’honneur familial n’a rien de neuf et rappelle le scénario de Ghayal, mais ce film-là est beaucoup plus maîtrisé : car notre héros fera payer au méchant (l’excellent Danny Denzongpa, l’acteur fétiche de Santoshi) chacune des humiliations qu’il a faites subir à son père (émouvant Amrish Puri), ce qui donne lieu à des moments de sadisme très durs. Chose intéressante, le cinéaste reprend le même schéma que le légendaire western-curry Sholay (Amitabh Bachchan fait d’ailleurs une apparition dans son propre rôle), à savoir un village/quartier assiégé par une horde de bandits dirigée par un chef cruel, tout en y insufflant une certaine maturité en réduisant l’aspect masala. Ce véritable western à poings nus, privilégiant l’arme blanche à l’arme à feu, est tout à fait mémorable, d’autant plus que le réalisateur est l’un des seuls à pouvoir canaliser Sunny Deol dans un film de qualité, très loin des films d’action nationalistes habituels de l’acteur, même si on a droit à quelques combats bien primaires.

Galvanisé par cette nouvelle réussite, Santoshi se lance en 98 dans un film à gros budget qui se veut un hommage à Akira Kurosawa et à ses Sept Samouraïs : China Gate met en effet en scène une dizaine de militaires vieillissants qui défendent un village terrorisé par un brigand. Ces vétérans qui se lancent dans un ultime baroud d’honneur font penser à La Horde Sauvage de Peckinpah, et le cinéaste choisit de n’insérer dans ce long métrage qu’une seule chanson (Chamma Chamma a d’ailleurs été reprise/remixée par Baz Luhrmann dans son film Moulin Rouge) pour se concentrer sur le pur film de genre. Cependant, les similitudes scénaristiques de ce « film de siège », sous-genre du western, avec son film précédent, Ghatak, n’ont pas intéressé le public indien, qui a boudé cette nouvelle version des Sept Mercenaires.

Malgré cet échec cuisant, Santoshi est à présent considéré comme une valeur sûre à Bollywood, et il dispose encore une fois d’un gros budget pour Pukar en 2000, un bon film d’action anti-terroriste avec Anil Kapoor et Madhuri Dixit. C’est un nouveau bide, mais Anil Kapoor remporte le National Award du meilleur acteur, et son frère Boney Kapoor, qui a produit le film (et donc perdu beaucoup d’argent), se déclare tout de même prêt à retravailler avec son réalisateur ! Dans les années 2000, l’infatigable cinéaste continue ainsi à enchaîner des projets importants. En 2001, Lajja est une œuvre féministe dotée d’une distribution impressionnante (Rekha, Madhuri Dixit, Manisha Koirala, Anil Kapoor, Ajay Devgan…). L’année suivante, The Legend Of Bhagat Singh est un ambitieux film historique sur le célèbre révolutionnaire indien, avec Ajay Devgan dans l’un de ses plus grands rôles.

Mais son film-phare des années 2000 est incontestablement Khakee en 2004. Certes, on y retrouve son nouvel acteur fétiche Devgan dans un rôle de méchant d’anthologie (une constante dans les films du minutieux cinéaste), mais ce très bon polar réaliste constitue avant tout un rôle en or pour Amitabh Bachchan, parfait en policier proche de la retraite chargé d’escorter un terroriste jusqu’au tribunal. Malgré quelques petites longueurs, ce multi-starrer (Akshay Kumar et Aishwarya Rai figurent également au générique) est l’un des films les plus riches de son réalisateur, qui fait pratiquement un sans-faute : excellente direction d’acteurs, sens de l’action, répliques qui font mouche, scénario plein de rebondissements, fin troublante, chansons rares qui passent à l’arrière-plan pour donner la priorité à l’intrigue policière… Mais Khakee est encore plus qu’un simple polar à succès, c’est le film-somme de Santoshi, à la fois film-dossier engagé sur la police indienne, nous présentant plusieurs portraits de flics assez fins dont la psychologie évolue au cours du film, et nouvelle variation sur le thème du western, cette fois-ci avec le sous-genre du « film d’escorte » ; il se démarque ainsi de ses westerns précédents, au scénario plus proche de Sholay, tout en confiant la vedette au héros de ce dernier, Amitabh, qui devient alors l’angry old man favori des Indiens.

Avec cette grande référence du film policier indien, Santoshi a donc mis la barre très haut, et il ne pouvait que décevoir légèrement avec son film suivant. Family-Ties Of Blood en 2006 est pourtant un bon film de genre, mais on ne peut s’empêcher de comparer ce polar musclé inabouti, dans lequel il reprend Amitabh et Akshay Kumar, à Khakee, qui était nettement plus riche et maîtrisé. En 2008, le réalisateur nous revient avec un thriller engagé, Halla Bol avec Ajay Devgan, mais il ne réussit pas à retrouver le succès de Khakee, son dernier hit.

Artisan chevronné, Santoshi a donc réussi dans sa carrière des films de genres variés (comédie, film social, film d’espionnage, film historique), même s’il reste avant tout le spécialiste hindi des films d’action intelligents, ainsi que l’instigateur du revival du western indien, ce qui fait de lui l’égal d’un Walter Hill (48 Heures, Extrême Préjudice), le maître américain du western urbain moderne, aux fusillades sèches et réalistes. Sa finesse en tant que scénariste et dialoguiste lui a permis de créer des personnages originaux, loin des plagiats d’Hollywood de beaucoup de cinéastes indiens, ce qui a régulièrement valu à ses protagonistes des récompenses pour leur interprétation, même pour des héros de films d’action comme Sunny Deol ou Ajay Devgan. Santoshi est l’un des rares réalisateurs indiens de ces deux dernières décennies dont chaque film ou presque est important (un peu comme Sanjay Leela Bhansali, sauf que ce dernier a réalisé deux fois moins de films), même les quelques films mineurs de ses débuts, dans lesquels il a lancé les frères Deol. Spécialiste à Bollywood de plusieurs genres distincts (néo-western, film d’action, drame engagé) qu’il sait sans peine mêler dans un style percutant, il est l’égal d’un autre cinéaste prolifique qui ne déçoit que rarement : Ram Gopal Varma, le maître hindi du film de gangsters et d’épouvante (dont le passage au western avec Aag est en revanche raté, malgré la présence d’Amitabh, figure emblématique et quasiment incontournable du genre). Espérons seulement que Khakee ne reste pas le dernier grand moment de sa carrière, et qu’il retrouve le chemin du succès avec d’autres belles réussites de ce genre…

Son dernier film, Ajab Prem Ki Ghazab Kahani, sorti fin 2009, est en tout cas relativement original dans sa filmographie, puisque c’est une comédie romantique avec Ranbir Kapoor et Katrina Kaif. Après ce succès, il a déjà un projet de film musclé et un de film en costumes, avec respectivement Sunny Deol et Sanjay Dutt, peut-être les deux plus grandes vedettes d’action de Bollywood. On lui souhaite que ces projets aboutissent !

Commentaires
Pas encore de commentaires
Filmographie

2012 (?) – projet sur la Partition, avec Sanjay Dutt

2012 (?) – projet de film d’action avec Sunny Deol, scénarisé par Shridhar Raghavan

2009 – Ajab Prem Ki Ghazab Kahani, avec Ranbir Kapoor, Katrina Kaif et Salman Khan (caméo)

2008 – Halla Bol avec Ajay Devgan, Vidya Balan, Pankaj Kapoor et Sanjay Mishra

2006 – Family-Ties Of Blood, avec Amitabh Bachchan, Akshay Kumar, Bhumika Chawla et Gulshan Grover

2004 – Khakee, avec Amitabh Bachchan, Akshay Kumar, Ajay Devgan, Aishwarya Rai et Tusshar Kapoor

2002 – The Legend Of Bhagat Singh avec Ajay Devgan, Farida Jalal, Raj Babbar, Amrita Rao et Mukesh Tiwari

2001 – Lajja avec Rekha, Madhuri Dixit, Manisha Koirala, Anil Kapoor, Ajay Devgan et Danny Denzongpa

2000 – Pukar avec Anil Kapoor, Madhuri Dixit, Danny Denzongpa et Lata Mangeshkar (caméo)

1998 – China Gate avec Om Puri, Naseeruddin Shah, Danny Denzongpa, Amrish Puri et Mukesh Tiwari

1996 – Ghatak, avec Sunny Deol, Meenakshi Sheshadri, Danny Denzongpa, Amrish Puri, Om Puri et Mukesh Rishi

1995 – Barsaat, avec Bobby Deol, Twinkle Khanna, Raj Babbar, Danny Denzongpa, Mukesh Khanna et Harish Patel

1994 – Andaz Apna Apna avec Aamir Khan, Salman Khan, Raveena Tandon, Karisma Kapoor et Shakti Kapoor

1993 – Damini, avec Meenakshi Sheshadri, Sunny Deol, Amrish Puri et Aamir Khan (caméo)

1990 – Ghayal, avec Sunny Deol, Amrish Puri, Meenakshi Sheshadri, Om Puri et Kulbhushan Kharbanda